Il ne faut pas sous-estimer l’imagination et l’entêtement de cette minorité de gens (de plus en plus petite je dirais) qui croient encore aux vertus de la réforme, à trouver des excuses et des raisons de ne pas admettre ce qui semble de plus en plus évident: La réforme était, dans ses principes mêmes, une mauvaise idée et une entreprise vouée à l’échec (celui des enfants bien sûr).
Cet extrait est tiré de ce message de la liste Édu-Ressource paru aujourd’hui. Il découle d’une conversation par messages interposés déclenchée dans la foulée de la publication d’un sondage Léger Marketing réalisé pour le compte de la Fédération des syndicats de l’enseignement (FSE).
À partir des résultats qui laissent entendre que la grande majorité des enseignants ne croient plus au bien-fondé du renouveau, l’auteur de ce commentaire qui est bien connu pour son opposition depuis sept ans à la réforme affirme que ceux qui continuent d’avancer sont des entêtés minoritaires…
Je crois qu’il ne faut pas prendre à la légère les conclusions tirées par les syndicalistes qui demandent maintenant que « le ministère de l’Éducation donne le mandat d’évaluer la réforme au Conseil supérieur de l’éducation ». Personnellement, je prends acte de cette position et je salue cette demande en même temps que je ne m’étonne pas de l’autre prise de position plus drastique qui est de vouloir tout arrêter. Aux premiers mois de l’implantation du nouveau programme de formation, le même syndicat avait organisé un défilé visant à jeter aux poubelles le document encore dans le cellophane dans le contexte des moyens de pression. Trois boycotts plus tard, on peut se demander si la FSE a déjà cru dans le projet qui a servi de monnaie d’échange pour de meilleures conditions de travail plus souvent qu’autrement?
Mais ce n’est pas ce qui m’étonne le plus. Ma vraie surprise réside dans le fait qu’on postule maintenant qu’il n’y a plus que quelques irréductibles s’entêtant à croire qu’il y a plus d’avantages que l’inverse avec le renouveau au sujet de la réussite scolaire des étudiants du Québec. Je ne crois pas. Voici pourquoi…
En fin de semaine, au Congrès thématique du PQ que j’ai blogué avec beaucoup d’ardeur, il y avait près de six cents personnes. En début d’événement, quelques délégués (dont le président de l’aile jeunesse des péquistes et le vice-président politique du parti [voir commentaire #4 de ce billet]) s’affichaient ouvertement contre la réforme. Après avoir fouillé d’où venait cette prise de position, j’ai obtenu de plusieurs sources que le porte-parole du Collectif pour une éducation de qualité et ex-président de cette même aile jeunesse était à l’origine de la petite vague contre la réforme qui avait l’air d’avoir emporté plusieurs jeunes, en particulier. Évidemment, que le PQ ait eu tôt fait de se positionner pour la réforme semble constituer un détail bien relatif dans cette histoire, mais je trouve intéressant de constater qu’à chaque fois qu’il y a des gens pour faire un lien entre l’enseignement par projet et la réforme, on trouve souvent les mêmes personnes à l’origine.
Autre exemple?
Voyons ce texte de Joseph Facal qui est à peu de chose près une réplique de ce qu’il avait déjà affirmé sur Indicatif présent. Une personne est mentionnée…
« On ne peut balayer du revers de la main les inquiétudes de sommités comme Clermont Gauthier, de l’Université Laval, qui pose une seule question : où sont les données qui établissent la supériorité de cette approche ? (on parle ici « des méthodes pédagogiques selon lesquelles l’enseignant devient un «accompagnateur» qui soutient «l’apprenant» (et non plus l’élève), qui découvre par lui-même ou par des projets en équipe.») »
L’idée me vient ce soir de « féliciter » ce groupe de personnes qui trouvent les bons arguments pour convaincre qu’on ne s’occupe plus des choses importantes dans le contexte de la réforme. Il y a de plus en plus de gens pour croire ce qu’ils colportent… et il faut leur donner qu’ils ont réussi à convaincre beaucoup de personnes clées de l’à-propos de leur point de vue.
Je demeure convaincu que le plus grand mérite de tout ce qui arrive est que nous débattons d’un sujet de la plus haute importance et cela me ravi. Mais on ne m’a pas encore convaincu que je faisais partie d’une vraie minorité. Sur le « terrain », je ne me sens pas seul dans le camp de ceux qui ne croient pas aux épouvantails…
Bonjour Mario !
Tu connais mon intérêt actuel pour la mise en place chez nous d’un plan d’action global en lecture. J’avais d’ailleurs présenté les grandes lignes de ce plan dans un commentaire, ici, chez toi. Pour « étoffer » ma pensée, je me suis abreuvé à différentes sources, dont le rapport du National reading panel, aux États-Unis, cette méta-analyse commandée par le Congrès américain en 1998 et dont les résultats ont été déposés en 2000. Plus récemment, j’ai mis la main sur un autre rapport, australien celui-là, et qui est titré: » National Inquiry into the Teaching of Literacy ». C’est produit par le gouvernement Australien. Les recommandations de ce rapport sont assez similaires à celles du NRP. Pourquoi je parle de ça, ici, c’est qu’en plus d’y parler des approches en lecture, on y fait une pointe du côté du constructivisme. Tu vas voir que le ton employé par le gouvernement australien est différent de ce qu’on entend ici aux rencontres nationales. Je ne commenterai pas, j’y réfléchis encore, mais je te le livre intégralement:
« Much curriculum design content, teaching and teacher preparation (en australie, on s’entend…) seems to be based, at least implicitly, on an educational philosophy of constructivism (an established theory of knowing and learning rather than a theory of teaching). Yet the Inquiry found there is a serious lack of supporting evidence for its effectiveness in teaching children to read. Further, too often emphasis is given to the nature of the child’s environment or background rather than on how a teacher should teach, resulting in insufficient attention being given to both ‘what’ and ‘how’ teachers should teach children to read and write. Whereas the ‘starting’ levels of children from less advantaged backgrounds is lower than those from more advantaged backgrounds, findings from a large body of evidence-based research consistently indicate that quality teaching has significant positive effects on students’ achievement progress regardless of their backgrounds. »
Ça te dit quoi à toi ?
PS: as-tu reçu mon courriel ?
Le NRP a influencé l’enseignement de la lecture en Angleterre, Australie et la France.
enseignement explicite du décodage et des stratégies de compréhension.
Bonsoir Marc,
Je viens de répondre à ton courriel… Désolé pour le délai. J’imagine que tu faisais référence au commentaire sur ce billet, concernant la lecture. Je te sais très passionné par ce sujet et tu as raison d’y revenir.
Qu’est-ce que l’extrait du rapport australien que tu cites me dit? Il me ramène aux sept années où j’étais directeur d’une école primaire ciblée pour implanter la réforme au primaire. Les enseignantes du premier cycle ont continué de privilégier l’approche qui a construit notre réputation et le succès des élèves au fil du temps. Les situations d’apprentissages que les élèves vivaient étaient d’inspiration constructivistes, mais en matière de lecture, l’enseignement plus direct était privilégié avec l’approche de Borel-Maisonny dans notre coffre d’outils; j’en parlais dans ce billet.
En résumé, je suis d’avis que ton extrait va dans le sens de ce que j’ai observé… et de ce que les profs de l’école où j’étais privilégiaient. Je ne voyais pas de contradiction avec le PDF de l’école québécoise et je sais que l’Institut continue actuellement à faire apprendre la lecture comme elle le faisait avant la réforme. Après discernement, c’est ce que nous avions de mieux à faire… ce qui ne veut pas dire qu’au premier cycle, il n’y a pas eu beaucoup de changements dans l’élaboration des situations d’apprentissage…
Bonjour Mario !
C’est exactement ce que je voulais dire. Le gouvernement ontarien a produit deux rapports importants en ce sens. Le premier était consacré à la lecture. Le groupe d’experts chargé de préparer le rapport était présidé par Danny Lavault, de l’Université d’Ottawa. Pour ce qui concerne l’enseignement de la lecture, l’approche privilégiée est de type enseignement explicite et propose de mettre l’emphase, notamment, sur les approches grapho-phonétiques et de revenir à un enseignemenr explicite du décodage en début d’apprentissage. Un second rapport est consacré à l’enseignement des maths, et cette fois-ci, l’orientation est explicitement constructiviste.
J’ai lu il y a peu de temps un commentaire de Robert Lyons sur l’un des blogues que tu fréquentes, et Lyons expliquait pourquoi, selon son expérience, une approche constructiviste était payante en math, mais que pour l’apprentissage de la langue, une approche d’enseignement explicite était davantage à privilégier. Les maths constituent un savoir construit, et les propriétés des triangles ont été découvertes par différentes civilisations, aux quatre coins de la planète. Pour ce qui concerne les langues, étant donné les variétés linguistiques importantes (alphabets phonétiques, idéogrammes, codes grammaticaux, diversité syntaxique, etc), on était en présence d’un savoir conventionné, créé de toutes pièces, donc qui peut difficilement être « découverts » ou « reconstruit ».
Compte-tenu du caractère transversal de l’habileté à lire et de son extrême effet de halo sur l’ensemble des apprentissages dans toutes les disciplines, peut-être que ce qu’on appelle « l’échec » ou les ratés de la réforme, ne tient qu’à une erreur, celle de ne pas avoir avoir choisi le bon paradigme pour l’enseignement de la lecture. Et celle de n’avoir pas accordé assez de temps à l’enseignement explicite de la lecture, trop préoccupés que nous étions à se lancer à corps perdu dans des projets sans fin, qui avaient certes une valeur, mais pas à ce moment du parcours scolaire d’un jeune enfant.
Je crois que vu sous cet angle, et compte-tenu de ce que tu m’écris sur la lecture à l’Institut St-Joseph, on se rejoint parfaitement.
Finalement, ce fut une longue route avant d’arriver à ce constat. C’est sans doute ce que j’essayais de dire quand j’écrivais qu’on n’apprend pas à piloter un F-18 de la même façon qu’on apprend à apprécier une oeuvre littéraire ou comprendre un phénomène historique.
Mais ce constat, je ne l’aurais sans doute pas fait de façon aussi édifiante et je n’en aurais peut-être pas autant saisi le sens et la portée n’eût été du chemin que j’ai parcouru, ici, chez toi, avec tous les gens qui viennent et interviennent !
En ce qui concerne les maths et l’efficacité d’un enseignement explicite pour cette discipline, voir les travaux de David Geary :
http://www.missouri.edu/~psycorie/
Geary a été nommé pour participer au National Mathematics Advisory Panel: Strengthening Math Education Through Research
Cette méta-analyse à venir en math est semblable à celle réalisée en lecture !
Ce sera intéressant de cheminer dans cette méta-analyse M. Bissonette, mais je n’ai pas observé la même chose en maths qu’en lecture de mon côté.
Quant à la conclusion de ton commentaire Marc, « you made my day », comme on dit. C’est un des plus beaux témoignages qu’il m’ait été donné de lire ici. Ces gens qui viennent et interviennent dans l’espace que j’anime me sont très précieux. J’espère qu’en lisant ton commentaire, ils apprécieront leurs contributions à la richesse de ton parcours. Tu es celui à qui on doit accorder le maximum de mérite parce que tu as osé réfléchir tout haut avec nous (dans le respect de mon environnement, soit) avec beaucoup de générosité.
Continuons à chercher… Il y a encore beaucoup de travail à faire, ensemble, dans la diversité de nos points de vue et de nos prises de position…
Les effets néfastes des pratiques constructivistes ont largement été démontrés en mathématiques avec la recherche de Manon Théorêt.
Malgré un accompagnement exceptionnel de didacticiennes des maths, (9 1/2 journées de rencontre sur une année) toutes les compétences mesurées en mathématiques auprès des élèves de 1e année primaire ont régressé et ce malgré une année de travail !
Il est nettement plus prudent de recommander des pratiques d’enseignement explicite en maths surtout que la seule méta-analyse sur les mathématiques à ce jour, celle de Russell Gersten (2001, je pense) fait état de l’impact positif de celle démarche d’enseignement.
Un algorithme, qui est une procédure conventionnée, et tout ce qui relève plus ou moins de connaissances procédurales, peut à juste titre profiter d’un enseignement explicite. Les concepts, c’est autre chose.
Voici un extrait d’un document co-signé par Laurent Lafforgue, un mathématicien qui n’est pas réputé donner dans les pédagogies « molles », si vous me pardonnez le terme. Un chaud partisan de la transmission des savoirs fondamentaux et du « back to basics ». C’est d’ailleurs dans le titre du document d’où est tiré cet extrait (Les savoirs fondamentaux au service de l’avenir scientifique et technique: Comment les réenseigner)
« Pas plus que les autres disciplines intellectuelles,les sciences ne peuvent être considérées seulement comme un jeu. Il n’est pas possible de faire l’économie d’un long travail d’apprentissage,et certains aspects n’apparaîtront réellement intéressants que sur le long terme. C’est pourquoi il est nécessaire de garder des heures de classe nombreuses et régulières, pendant lesquelles les élèves suivent un cours bien structuré, impliquant l’apprentissage de notions fondamentales et la pratique d’exercices au sens classique du terme. Mais il est vrai aussi que les sciences se prêtent à une approche plus libre et plus ludique, à laquelle un certain nombre d’élèves peuvent être sensibles et qui peut les amener à s’intéresser davantage à la démarche scientifique : non pas un savoir qui tombe du ciel et auquel on reste extérieur, mais une construction humaine patiemment élaborée au cours des siècles en exploitant des intuitions fondamentales partagées par tous, dans laquelle chacun peut entrer, poser des questions et chercher des réponses. »
Je trouve que c’est là une vision pragmatique et réaliste. On sort de la pédagogie unidimensionnelle et des allégeances inconditionnelles. Je dépose cela ici, pas pour convaincre, juste pour y penser.
Je me permets, M. Asselin, de reproduire ici quelques parties d’une réponse que j’ai publiée sur le blogue de M. André Chartrand et qui fait également suite à votre propos.
M. Chartrand réagissait donc à la lettre de Marc Turgeon, doyen de la faculté des sciences de l’éducation à l’UQAM, publiée dans le journal La Presse. Cette dernière, écrite avec beaucoup d’ironie, s’en prenait aux opposants de la réforme.
«Pour ma part, je dois avouer que plusieurs des tenants de la réforme ne m’ont pas prouvé leurs talents de pédagogue au cours des dernières années. Les cordonniers sont mal chaussés, dit-on, et ils le prouvent une fois de plus. Si la réforme est supposée donner du sens aux apprentisages des enfants (question de les motiver et de leur fermer le clapet quant ils demandent à quoi ça sert d’apprendre), comment se fait-il que les partisans du Renouveau n’aient pas réussi à démontrer la valeur de celui-ci ? Les enseignants ne sont quand même pas tous des imbéciles conservateurs manipulés par la FSE ou d’obscurs complices du collectif CEQ à ce que je sache?
Il existe implicitement et explicitement une certaine forme de mépris chez les tenants du Renouveau à l’égard de ceux qui ne partagent pas leur point de vue. Au départ, ils ont longuement cassé les oreilles de plusieurs enseignants en affirmant que la pédagogie traditionnelle nuisait aux élèves. Ensuite, avec leur discours voulant que le socio-constructivisme soit une approche moderne et efficace scientifiquement, ils ont rejeté au rang des croyances moyenâgeuses d’autres façons tout aussi bonnes d’apprendre. Il a même fallu que le MELS corrige le tir en indiquant que les dictées et autre forme d’apprentissage n’étaient pas interdites en classe parce qu’on en était presque rendu à ostraciser, dans certains milieux, ceux qui voulaient maintenir ces pratiques.
Je ne peux aussi passer sous silence tout ce vocabulaire très connoté à l’effet que les partisans du Renouveau soient des innovateurs qui veulent réduire le décrochage scolaire dramatique chez les jeunes tandis que les opposants à la réforme soient des résistants au progrès et, implicitement, n’aient que faire des décrocheurs. J’ai toujours appris à me méfier de ceux qui se drapent dans la vertu pour justifier leurs actions… Faut-il également souligner que la résistance n’est pas toujours un mal en soi, mais ici on tente malhabilement de culpabiliser ceux qui n’ont pas été convaincus des bienfaits du renouveau et j’en ai un peu marre.
En fait, pour l’instant, j’ai l’impression que les partisans de la réforme sont passé de l’euphorie à la dépression. Au début, ils ont cru tellement à leur projet qu’ils ont oublié l’essentiel: le faire partager, convaincre les enseignants de la valeur de ce dernier. Il aurait fallu tout remettre en question nos façons de faire en les croyant sur parole et en appliquant une réforme sur notre bras parce que les conditions d’implantation de cette dernière étaient et sont encore dérisoires. Devant les critiques qui se sont élevées concernant le renouveau, ils se sont campés solidement dans leurs positions et en sont venus, dans certains cas, à défendre l’indéfendable et à perdre leur propre sens critique.
Aujourd’hui, selon eux, les difficultés de la réforme sont attribuables aux méchants journalistes toujours prompts à chercher le scandale et aux plus que méchants enseignants qui ont boycotté la formation reliée au renouveau. La récente sortie de M. Bisaillon, pourtant un ex-syndicaliste, à cet effet illustre bien ce propos. En fait, il s’agit de la faute de tout le monde sauf de la leur. Ils sont donc des victimes, ce qui leur évite bien évidemment d’assumer leurs propres erreurs et leurs propres errements.
Les réformateurs avaient le fardeau de la preuve. Ils n’ont pas su convaincre. Pour l’instant, tant le PLQ que le PQ ne peuvent reculer sur le renouveau, question d’image politique. La réforme n’est pas morte: elle est en sursis. Et la faire contre la volonté des enseignants, dénigrer, accuser, mépriser ceux qui n’y croient pas ne fera rien pour arranger les choses.»
Pour revenir plus directement à votre propos, et pour vous montrer comment des points de vue concernant une même situation peuvent être divergeants, je suis toujours demeuré convaincu que la FSE appuyait la réforme et que son discours parfois plus revendicateur n’était qu’une façon de ne pas s’aliéner outre mesure les membres de l’Alliance de Montréal. La FSE affirme vouloir améliorer le renouveau, pas le détruire. Elle est donc partisane de la gestion participative, si l’on veut.
Enfin, le retard du rapport de la Table de pilotage sur la réforme est très indicatif à l’effet qu’aucun concensus ne s’est dégagé de ses travaux et il est fort à parier que le ministre commettra une fois de plus l’erreur de passer une fois de plus par-dessus les enseignants.
Si on se targue de se centrer sur les apprentissages, on devrait être sensible à ceux demandés aux enseignants. Je partage ce point de vue M. Papineau. Je n’ai pas de problème avec les résistances. Elles me nourrissent… Et je ne me sens pas déprimé non-plus, mais bon, si c’est l’image que je projette… je peux vivre avec 😉
Personnellement, j’ai suivi le cheminement inverse de celui que vous décrivez. J’ai fait partie des sceptiques au début. Moi aussi, je crois que l’approche plus directe en enseignement a ses avantages en certaines occasions. Dans les premières réunions d’écoles ciblées, je me sentais le « mouton noir » des directeurs; dans les yeux de M. Bisaillon entre autres qui ne s’est jamais gêné pour que je le ressente. Quand le MELS s’est mis à cesser de ne parler que de l’approche par projet (après quelques mois), j’ai baissé la garde et j’ai regardé de plus près, malgré la pression que je vivais puisque « mon » école continuait d’évaluer les connaissances acquises en plus des compétences et ça ne plaisait pas à tous autour de la table… J’aurais pu me braquer et cesser de croire aux vertus de cette réforme, mais j’ai persisté dans mes recherches de sens parce que j’aime beaucoup l’idée du changement de paradigme. Surtout, j’ai constaté tout au long de ma pratique que l’enseignement traditionnel (pour reprendre votre expression) ne faisait pas toujours apprendre et que PARFOIS même, il « écoeurait » l’élève se trouvant avec des profs qui prétendent faire leur travail parce qu’au fond, « ils enseignent ». Je croyais (et je crois encore plus aujourd’hui) que l’école serait meilleure en étant centrée sur les apprentissages plutôt que sur l’enseignement.
Depuis quelques temps, je me retrouve étiqueté « pour » la réforme. Je ne subi pas cet état de fait puisque personne ne m’a forcé à aller à l’avant-plan. C’est Monsieur Bisaillon qui doit rigoler de savoir que je suis devenu un défenseur du renouveau ! Il doit se dire qu’on est rendu bas… Je rigole, parce qu’on s’est recroisé depuis ce temps et le courant passe mieux aujourd’hui…
Je suis convaincu que les « enseignants ne sont quand même pas tous des imbéciles conservateurs manipulés par la FSE ou d’obscurs complices du collectif CEQ » M. Papineau. Vous avez raison de dire que les enseignants qui sont contre les changements proposés ou simplement sceptiques n’ont pas à subir de mépris de qui que ce soit.
Ce qui me choque M. Papineau, c’est d’entendre des gens de la FSE (surtout du groupe de ceux qui se sont divorcés dernièrement), du groupe de M. Gauthier et du CEQ continuer de prétendre que la réforme c’est l’enseignement par projet où «l’apprenant» (et non plus l’élève) découvre par lui-même ». CE N’EST PAS ÇA et c’est à la base de mon adhésion au renouveau, vous comprenez.
Je fais partie de ceux qui expliquent mal, sans doute… Mais parfois, j’ai l’impression d’être devant des gens qui se tassent quand l’information arrive pour être sûr de ne pas l’avoir entendu…
Messieurs, il est possible de discourir longtemps sur ce qu’est la réforme ou non !
Mais lorsque 83 % des enseignants estiment que la réforme n’a pas permis d’accroître la réussite des élèves et que ce taux augmente à 85 % en ce qui concerne la réussite des élèves en difficulté, je pense que le verdict est clair. Aucune ambiguité !
Ce qui me semble le plus important dès maintenant est la suite des choses !
Monsieur St-Pierre,
Il ne faudrait pas oublier cet extrait du texte (conclusion) qui provient du même document auquel vous faites référence:
«De manière générale, l’enseignement doit procéder de l’élémentaire à l’élaboré plutôt que l’inverse. Il faut cesser de prétendre que l’élève est capable de “construire” seul ses savoirs ou d’analyser d’emblée des situations complexes
pour en tirer des éléments particuliers utilisables. Il faut au contraire mettre les élèves en situation d’appréhender des notions fondamentales à partir de la culture et du savoir tels qu’ils ont été patiemment construits et reconstruits au cours des siècles – sans oublier néanmoins de leur laisser une marge d’initiative, de réflexion et d’exploration» (Ballan, Bismut, Connes, Demailly, Laforgue, Lelong et Serre, 2004, p. 22).
J’avais lu cet extrait aussi. C’est pourquoi j’écrivais: »Voici un extrait d’un document co-signé par Laurent Lafforgue, un mathématicien qui n’est pas réputé donner dans les pédagogies « molles », si vous me pardonnez le terme. Un chaud partisan de la transmission des savoirs fondamentaux et du « back to basics ».
C’est ce qui me rendait tout à fait confortable de publier le morceau que j’avais choisi. Je trouvais l’approche de ces auteurs, pragmatique, malgré tout, et l’extrait que vous nous servez en témoigne. Je ne suis pas de ceux qui croient que l’élève peut seul, reconstruire tout le savoir du monde. Mais ce peut être rentable, au plan pédagogique, de lui faire redécouvrir le chemin qu’il aura fallu parcourir à un Eratosthène pour mesurer la circonférence de la terre en plantant deux bouts de bois dans la terre. Alors, encore une fois, pour reprendre les mêmes auteurs, je ne prétends pas » que l’élève est capable de “construire” seul ses savoirs ou d’analyser d’emblée des situations complexes
pour en tirer des éléments particuliers utilisables. Il faut au contraire mettre les élèves en situation d’appréhender des notions fondamentales à partir de la culture et du savoir tels qu’ils ont été patiemment construits et reconstruits au cours des siècles – sans oublier néanmoins de leur laisser une marge d’initiative, de réflexion et d’exploration» » Le dernier bout est important. Il y a là une recherche d’équilibre et d’efficacité pédagogique, et c’est ce qui, pour moi, prime.
Une dernière remarque: je n’ai personne à convaincre. Je viens ici pour réfléchir. Chaque jour, je dois prendre des décisions et j’aime bien qu’elles s’appuient sur un certain niveau de réflexion. Pour moi, cette façon d’apprendre fonctionne plutôt bien…