C’est l’opinion qu’exprime Joseph Facal dans sa chronique de la semaine publiée aujourd’hui chez Canoë et reprise incessamment sur son blogue. Le raisonnement est le suivant:
«Au Québec, malgré nos droits si bas, un enfant dont les parents gagnent plus de 100 000 $ par an a plus de deux fois plus de chances de fréquenter l’université que celui dont les parents gagnent moins de 25 000 $. Si les hausses des droits ne freinent pas la fréquentation universitaire, c’est parce que la majorité des enfants issus des milieux pauvres ne se rend même pas jusqu’aux portes de l’université. Autrement dit, des droits de scolarité ridiculement bas reviennent à faire subventionner l’éducation universitaire d’enfants issus, pour la plupart, des milieux aisés, par les travailleurs à revenus modestes, dont les enfants auront proportionnellement moins de chances d’accéder à l’université.»
M. Facal n’est pas reconnu pour faire dans la langue de bois et il le prouve en début de chronique en sous-entendant que le sociologue Guy Rocher n’a probablement pas lu ce qu’il a co-signé dans le Devoir de lundi. Il y était écrit que «la hausse des droits de scolarité ne vient que renforcer le problème de l’accessibilité et, du même coup, la division entre les Québécois». Joseph Facal affirme qu’il ne faut pas laisser passer «une telle ineptie»!
Tout comme M. Facal, j’ai beaucoup de respect pour le travail de M. Rocher. Je ne comprends pas du tout sur quoi il s’appuie pour afficher une aussi grande confiance dans le lien qui uni «l’accessibilité aux études supérieures» et le maintient des droits de scolarité à un aussi bas niveau. Je comprends les pièges de la «vision utilitariste de l’éducation», et je suis sensible aux arguments de ne pas imposer «une réduction de la « biodiversité » intellectuelle», mais je ne peux accepter le sous-financement actuel de l’université. J’ai deux garçons actuellement au Bac qui n’ont accumulé aucune dette d’études et j’ose le dire candidement, nous serions capables de payer davantage pour qu’ils puissent avoir accès à la meilleure formation possible. Nous ne sommes pas riches, mais l’éducation est une priorité, avant la cigarette, la loto et bien des leurres qui prend trop souvent une grande part du budget des gens que je croise au dépanneur. Je crois vraiment au système des prêts et bourses qui m’a permis de faire des études universitaires au début des années 80. C’est par ce système qu’on peut réguler une certaine «justice sociale», pas par le maintient d’une logique qui n’aide en rien l’accessibilité et qui de plus, provoque une certaine dégradation de la qualité de l’enseignement postcollégial.
Je ne suis pas toujours d’accord avec M. Facal, mais sur ce point, il apporte des arguments «bétons»!
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Sans réagir sur le fond de la question, Mario, il me semble que l’argument de M. Facal que tu nous rapportes est un peu faible. Les gens qui gagnent moins de $ 25 000 par année ne paient pas d’impôt ou presque. Ils ne subventionnent rien du tout.
Si je ne m’abuse, il me semble avoir lu que 40% de la population ne paient pas d’impôt. Ce sont les plus pauvres de la société et ce sont leurs enfants qui, malheureusement, sont le moins susceptible d’aller à l’université, c’est vrai.
Mais, je le répète, ils ne subventionnent rien du tout.
Par ailleurs, on retrouve grosso modo la même population chez les décrocheurs du secondaire. Va-t-on contester la gratuité scolaire au secondaire pour ce motif?
J’ai lu de biens meilleurs arguments en faveur du dégel.
Quand M. Facal parle des «travailleurs à revenus modestes», je comprends qu’il parle des gens qui gagnent peu, mais qui paient des impôts. Remarque que les gens qui ne paient pas d’impôts, paient des taxes tout de même et «financent» par conséquent ce que l’État est obligé de donner pour ceux qui fréquentent l’université…
Aussi, je comprenais que M. Facal en avait surtout contre le lien «hausse des droits de scolarité» et «problème d’accessibilité». Tu as raison qu’il existe de meilleurs arguments pour justifier une hausse raisonnable de ces frais…
Cher Mario,
La question du niveau ou de la hauteur des droits de scolarité est relative. Ainsi, vous mentionnez : « le maintien des droits de scolarité à un aussi bas niveau ». Aussi bas comparativement à quoi? Aux États-Unis, au Canada anglais, au Royaume-Uni, à l’Australie? Certes, mais il importe toutefois de rappeler, que malgré cette hausse généralisées des droits de scolarité, particulièrement observée dans les pays anglo-saxons, où on tend de plus en plus à voir l’éducation supérieure comme un bien privé, voire un bien de consommation à vendre au plus offrant, que plusieurs pays maintiennent des droits plus bas qu’au Québec, où, faut-il le rapeller encore, ces droits ont récemment connu une hausse progressive qui, à terme, représentera 500$ par trimestre.
Un des problèmes majeur dans le dossier des droits de scolarité est la confiance qui a été rompue entre le gouvernement et le mouvement étudiant. En effet, historiquement, les hausses de droits de scolarité n’ont jamais été accompagnées de bonification dans le système de prêts et bourses et, encore plus scandaleux à mon avis, d’un réinvestissement dans le système d’enseignement universitaire. Plus de prêts certes, mais qu’en est-il des bourses? Et lors de la hausse des droits de scolarité du début des années 1990, le gouvernement ne s’est-il pas empressé de réduire son financement aux université d’un montant au moins équivalent à cette hausse?
À cet effet, la décision avortée du gouvernement Charest de couper 103 millions de dollars dans le système de prêts et bourses, la lenteur dans la mise en place d’un règlement pour encadrer ces frais afférents qui pullulent, sa volte-face électoraliste quant aux transferts fédéraux qui sont allés dans des baisses d’impôts plutôt qu’en éducation post-secondaire, et la maigrelette somme prévu dans le dernier budget pour les universités n’ont rien fait pour rassurer le mouvement étudiant de ses bonnes intentions. Ainsi, et avec raison, celui-ci ne veut pas être le dindon de la farce de cette histoire… Payer plus pour des services qui ne s’amélioreront probablement pas, faute d’un réel réinvestissement, voire qui se dégraderont, et ce, au non d’une idéologie individualiste qui voit l’enseignement supérieur qu’à l’aulne de sa « plus-value » marchande. La réponse ne peut être que non! Et j’avoue que je les comprends… À mon avis le gouvernement doit donner des preuves tangibles qu’il est prêt à réinvestir dans les universités avant d’aller piger dans les poches des étudiants (ou de leurs parents!), qu’ils soient pauvres ou riches…
J’ai bien peu à redire sur votre argumentation David… je la partage en grande partie.
La tendance à considérer «l’éducation supérieure comme un bien privé (ou de consommation)» n’est pas souhaitable et la hausse relative des frais de scolarité DOIT s’accompagner à la fois d’une augmentation du financement universitaire et d’une «bonification dans le système de prêts et BOURSES».
Personnellement, je trouve que le mouvement étudiant doit revoir sa stratégie de négociation si il veut retrouver la crédibilité d’antan. Les dirigeants me semblent avoir fermé très tôt la porte à toute hausse quelle qu’elle soit et avoir eu le mot «grève» trop souvent au bout de la langue. Les étudiants ne les suivent plus, ni ceux qui sont politisés dans les ailes jeunesse de partis politiques, ni ceux qui sont des étudiants réguliers. À une moment où toutes les portes leurs sont ouvertes au niveau du marché du travail, ils ont le devoir de revendiquer une formation universitaire de grande qualité (et ils seront appuyés par toutes les couches de la société); mais ils doivent cesser de jouer le jeu de ceux qui prétendent que «hausse des droits de scolarité» = «problème d’accessibilité»…
[…] de scolarité à l’université. J’ai écrit de nombreux billets sur le sujet ( dont 1, 2, 3 et 4) et on comprendra que j’étais de ceux qui trouvent que les étudiants sont déjà […]
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