Nicolas Sarkozy est à Québec aujourd’hui, la ville que j’habite… C’est le «talk of the town» depuis quelques jours. Je viens d’entendre le Président de la République française (et aussi, actuellement, Président de l’Union européenne) dire qu’il «ne voit pas au nom de quoi une preuve d’amour pour le Québec, fraternelle et familiale, devrait se nourrir d’une preuve de défiance à l’endroit du Canada». Il répondait à une question d’un journaliste de Radio-Canada.
«Je sais parfaitement qu’au Québec il y a des francophones qui font partie de notre famille. Mais les francophones de ma famille ne me demandent pas de ne pas considérer le Canada, grand continent en vérité, comme des amis. Voilà.»
Il entre actuellement au Parlement pour s’adresser aux élus de l’Assemblée nationale. Il s’en va dire:
«Les Canadiens, les amis; les Québécois, notre famille…»
On passe à autre chose que cette formule négative du ni… ni… C’est pas mal! Il semble que ce soit la manifestation de «cette France qui apaise», selon le dire de M. Sarkozy lui-même.
Je m’arrête de travailler quelques instants. Je l’écoute et je reviens…
Mise à jour d’après discours: Dans sa présentation introduisant M. Sarkozy, Jean Charest (le premier ministre du Québec) a affirmé que le Québec et la France sont «unis par le temps, le coeur et le sang», pour toutes sortes de bonnes et de mauvaises raisons. Juste avant de céder la parole à notre invité, il l’a prévenu qu’aujourd’hui, ici, c’est lui «qui a un accent». Je ne résumerai pas le vibrant plaidoyer du Président pour un Québec fort dans un Canada uni, mais force est d’admettre qu’il n’a pas répondu à l’appel de Jean-François Lisée et Louise Beaudoin à savoir si «la France serait [toujours] aux côtés du Québec si, un jour, une majorité de Québécois ayant choisi l’indépendance, le Canada refusait de reconnaître cette décision.» Avait-il à le faire? Sûrement pas… diront les observateurs les plus partisans du leader Français qui a beaucoup de chats à fouetter en ces temps d’incertitudes. Mais il a quand même prononcé des paroles très touchantes sur le Québec, «suffisamment sûr de lui pour être ouvert aux autres!» Il nous a invités à Québec, à construire une communauté (c’est son expression) «transatlantique» moderne, où il est nécessaire de «refonder un capitalisme plus respectueux de l’homme, pour en finir avec un capitalisme qui ne cherche que le profit, à court terme». Ce n’est quand même pas rien… Sans compter cette entente sur la mobilisation de la main-d’oeuvre défendue avec autant de verve: «À quoi sert-il de dire qu’on s’aime, si le diplôme qu’on a dans un endroit où on s’aime, amène suffisamment d’amour, mais pas assez de droit?»
J’ai vraiment eu le sentiment pendant son allocution que M. Sarkozy nous invitait à jouer les ambassadeurs. La France est en quelque sorte la porte du Québec pour l’Europe et le Québec est quant à lui, cette même porte pour la France en Amérique… C’est sûrement ce qu’il a voulu exprimer quand il a dit: «que nous avons pris ce qu’il y avait de mieux aux États-Unis et ce qu’il y avait de plus intéressant en Europe». Je ressens cette nature quand je suis en compagnie des cousins, des gens du ROC ou des USA… Nous serions, le Québec, «ce miracle: si proche et si différent, à la fois!». Sortant de son discours, il a même vanté notre franchise, «qui se traduit si bien dans notre presse», semble-t-il!
Il s’agit donc de savoir si cette France qui voudrait nous apaiser va véritablement réussir à convaincre ceux qui rêvent d’un pays de devenir les uniques porteurs d’une mission délicate, auprès de l’Europe et de l’Amérique qui auraient moins besoins de division que d’union, et ce, en français.
Je veux bien y réfléchir…
Mise à jour «d’après ouverture» du XIIe Sommet de la Francophonie de Québec: M. Sarkozy en a remis sur le thème de la diversité qui fonde l’identité de la francophonie. Il appelle à se ranger derrière une vision de la famille francophone où la langue n’est pas le seul dénominateur commun, mais aussi, une certaine idée de l’humanisme en même temps qu’une certaine vision du monde. Ce rappel que la présente crise financière n’est pas qu’une parenthèse et que la spéculation ne peut continuer d’asseoir le capitalisme, n’a eu de cesse de l’habiter devant les participants au Sommet autant qu’en début d’après-midi au Parlement; «rien ne peut continuer comme avant… la francophonie doit porter la nécessité du changement», implore-t-il! Il aurait aussi pu parler du défi numérique de la francophonie… Bref, «Sarko» passe peut-être en coup de vent à Québec, mais la qualité de sa présence risque de durer plus longtemps que le nombre d’heures où il aura foulé notre sol…
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Je ne suis pas d’accord avec vous Mario. Le mot fidélité est absent du vocabulaire de M. Sarkozy, qui plus est lorsqu’il s’agit de loyauté dans sa «famille». N’est-il pas l’homme qui a dompé sa femme trois mois après avoir été élu à la présidence l’an dernier? Aujourd’hui, il fait la même chose avec le Québec.
Au delà de la logorrhée sirupeuse de cet opportuniste qui se croit être la réincarnation d’Adam Smith, saveur XXIe, le président le plus anglophile (et le plus francophobe de la Ve République) sert bien ses maîtres du grand capital qu’il prétend «réformer». Tout le reste n’est que de l’opérette de bas étage destiné à épater la galerie d’incultes béats que nous sommes parce que nous ne n’avons pas l’habitude de tels étalages de verbosité grandiloquente.
En clair, Sarko n’en a rien à foutre du Québec, le sujet l’emmerde. C’est pourquoi il filera à l’anglaise dans quelques heures pour aller déjeuner avec son pote Dubya. Voilà ce qu’il fallait retenir du passage de ce sombre personnage dans notre ville.
«la qualité de sa présence risque de durer plus longtemps que le nombre d’heures où il aura foulé notre sol…»
J’ai bien peur que ça soit davantage un souhait qu’une réalité. Avec le recul, un seul président français a laissé une marque durable au Québec. Il était venu nous dire de nous prendre en main une bonne fois pour toute et qu’alors la France nous soutiendrait. Il s’appelait Charles de Gaulle. Après, ça s’est dégradé. Mais je ne suis certainement pas de ceux qui vont reprocher ses amitiés à Sarkozy. Je constate, en revanche, qu’il est venu nous dire d’oublier le «Vive le Québec libre». Je ne crois pas qu’il aura réussi.
Vous écrivez bien M. ClaudeB.
Je ne vous rejoins que sur le fait que nous ne sommes pas très habitués aux discours si bien déclamés… M. Sarkozy peut choisir ses amis (et il le fait parmi des gens qui penchent à droite, soit), mais il ne peut choisir sa famille. Et en ce sens, ce qu’il a dit nous honore et respecte l’indécision dont nous faisons preuve sur la question nationale, et ce, depuis des lunes. Est-ce que la France est moins prête qu’avant à nous accompagner? La première chose qu’il faut considérer pour bien répondre à cette question c’est de compter le nombre de virages que nous prenons. Nous ne sommes pas très faciles à suivre… imaginez quand il s’agit d’accompagner! Sur la durée de sa visite, je crois que Sarko a bien répondu (il est aussi Président de l’Union européenne) et perso, je ne lui en tiens pas rigueur, dans les circonstances.
Vrai qu’il est trop tôt Michel pour savoir si le Président Sarkozy aura marqué autant que de Gaule… Ce serait surprenant. Mais il demeurera le premier à avoir parlé de notre Nation dans le Parlement… J’ai compris qu’il nous disait de moins nous concentrer actuellement sur le «Vive le Québec libre», mais de l’oublier? Tu vas loin un peu.
Le problème avec la question nationale actuellement est qu’elle a pris le deuxième rang en arrière du projet de société, si ce n’est pas le troisième en arrière de plein d’autres sujets possible. Les nationalistes qui penchent à droite veulent de moins en moins faire confiance aux porteurs de ballon bloquiste et péquiste et ceux qui portent à gauche au provincial ont maintenant d’autres choix pour leurs valeurs que le PQ. Faudra-t-il s’entendre d’abord sur un projet de société rassembleur avant de s’unir pour décider d’un pays? Je dis cela parce qu’à l’inverse, un très petit nombre de personnes semblent prêtes à donner «un chèque en blanc» à une formation politique pour aller de l’avant avec le pays… Et cela, les Français le voient aussi bien que nous!
Moi je veux bien construire un projet de société rassembleur avant de revenir avec La question. Contrairement à plusieurs, j’aime mieux un pays avec tout le monde qu’un semblant de pays avec la division comme base.
Deux ajouts en ce dimanche P.M., au moment où se conclut le Sommet de la francophonie de Québec. Jean Charest a senti le besoin de préciser qu’au moment d’un retour d’une éventuelle période référendaire sur la question nationale la politique française du «ni-ni» n’aura d’autre choix que de reprendre du service. Aussi, comme je l’écrivais hier, la sortie de Jacques Parizeau reprenant M. Sarkozy est déplorable et n’aide en rien la cause souverainiste et encore moins le P.Q. Si le «Vive le Québec libre» gaulliste a été le détonateur de bien des émotions il fut un temps, le «Québec est notre famille» n’est quand même pas la gifle que veut nous faire croire certaines belles-mères du P.Q.
Il y a deux modes d’interprétation des paroles du président français («Les Canadiens, les amis; les Québécois, notre famille…»). Et elles sont incompatibles.
La première repose sur un classique jeu à somme nulle: si je gagne, tu perds (et vice-versa). Reconnaître le Québec, c’est nier le Canada. (et vice-versa). Les journalistes ont suivi cette piste.
La seconde tente l’inverse: la reconnaissance de l’un n’implique pas un changement de rapport avec l’autre.
J’ai l’impression que la métaphore matrimoniale de Sarkozy laisse peu de place à l’interprétation: on ne peut souhaiter que sa soeur divorce sans peiner son mari qui est aussi son ami.
On pourrait alors résumer ainsi : qui prend mari prend pays.
Une vision très machiste et traditionnel en quelque sorte.
À ajouter, parmi les sources qui complètent la réflexion sur ce sujet, le billet de Joseph Facal, «Le retour du boomerang», où il termine en écrivant, «Le problème est ici et nulle part ailleurs». Nous sommes au moins d’accord sur ce point!
Contrairement à plusieurs, j’aime mieux un pays avec tout le monde qu’un semblant de pays avec la division comme base.»
C’est la solution idéale, mais malheureusement aucun pays n’est né sans divisions, même sanglantes dans plusieurs cas. Nous serons un jour un pays, le jour où une majorité (pas la totalité) l’aura décidé. En ce qui concerne l’attitude de Sarkozy, je veux bien nuancer mes propos dans le sens que vous soulevez. Donnons-lui le bénéfice du doute, mais doutons nous aussi de lui.
C’est une honte ! Je suis un français de France. Il n’est pas un Roi comme je l’ai lu sur certains blog québécois, mais je dirais plutôt un tyran tirant tout ce qu’il est possible vers lui. J’ai honte de ses propos. Mais même s’il est le représentant politique de la France ne croyez pas que les Français partagent ses opinions. Ça côte de popularité baisse. Il le W. Bush à la française. Bref un drame. Je connais votre province, votre pays, et je soutiens votre désir d’indépendance. Certains français dis de vous que vous êtes « nos cousins »d’Amérique. Mais ils ont la mémoire courte, du moins, cela fait parti de ce qui ne nous est pas enseigné à l’école. Je sais que c’est la France qui vous a abandonnée aux anglais. Et j’ai la triste impression que l’histoire ce répète. Je vous en prie ne généralisez pas sur notre peuple. N’oubliez pas qu’il n’est là que pour un quinquennat (enfin j’espère). Cet imbécile à oublié que la phrase du Québec est « Je me souviens »… Pour ma part. Vive le Québec libre !