L’édition de décembre 2009 du Magazine «Savoir» de la Fédération des commissions scolaires du Québec contient une chronique de mon copain Carl-Frédéric De Celles qui porte sur l’importance des réseaux en général et de certains dispositifs d’échanges et de publication de contenu reconnus pour être plus «sociaux». On peut consulter le texte en format .pdf ou sous l’hyperlien plus bas. Dans la même revue, il est aussi question de la génération C et de l’école publique, article dans lequel on rapporte certaines de mes préoccupations. Mais je préfère de beaucoup, l’excellent texte de Carl-Frédéric…
Vous et les réseaux sociaux.
L’arrivée rapide (et brusque, avouons-le) des réseaux sociaux numériques (Facebook, Twitter et autres) provoque des chocs culturels importants chez les élus scolaires, les gestionnaires des commissions scolaires, les directions d’école, les professeurs, les parents et les élèves. Lors d’une récente formation, on me posait la question : « Notre commission scolaire devrait-elle être sur Facebook? » Ma réponse a pu paraître simpliste ou déconcertante : « Votre commission scolaire y est déjà, le saviez-vous? »
Être ou ne pas être, telle est la question
Prenons Facebook pour ce qu’il est : rarement au cours des dernières années aurons-nous eu la chance d’assister à une croissance si rapide d’un outil de gestion et de diffusion de l’information personnelle. Sous-produit du Web, qui lui-même a généré beaucoup de remises en question et d’apprentissages nouveaux, Facebook doit être compris pour ce qu’il est : une façon de tisser des liens et de communiquer, où la majorité des jeunes et plusieurs adultes se sont créés des profils et ont tissé des liens « d’amitié » (le terme est trompeur, mais tout de même) entre eux. En échangeant de l’information (parfois sensible), en partageant du contenu (liens, photos, vidéos, etc.), et en joignant des groupes, ils se sont construit une sorte d’identité numérique qui en dit beaucoup sur eux… et sur vous.
Écarter Facebook et les réseaux sociaux serait, selon moi, une grave erreur. Il faut en comprendre leur essence et leur influence, car les réduire à des outils dangereux (ou à interdire) rendra le système scolaire aveugle à bien des nouvelles opportunités d’apprentissage. D’où la question : «Notre commission scolaire devrait-elle être sur Facebook? » Elle fut posée dans l’optique du recrutement de nouvelles clientèles, mais elle se pose aussi à bien d’autres niveaux. Une petite recherche sur Facebook a révélé que cette commission scolaire (celle dont je parlais précédemment) y était déjà de plus d’une façon : des anciens réunis de nouveau, des professeurs animant des groupes d’élèves, de la promotion d’activités scolaires, des photos de party, des jeunes qui aiment leur école et d’autres qui l’aiment moins. Une vision éclatée, mais que l’on remarquera tôt ou tard et qui fera de vos écoles des endroits « cools » ou « moches ».
Leçons numériques
Il n’y a pas de recettes miracles qui permettraient de simplifier le tout en peu de mots, mais tout de même, retenons quatre leçons utiles de cette « révolution socionumérique ».
Première leçon
Tenter de contrôler la bête représente de l’énergie gaspillée, puisque la bête a été conçue pour contourner les obstacles (c’est l’idée au coeur d’Internet, réseau conçu pour assurer sa survie). Souhaiter contrôler Facebook par la négative (censure, intervention, blocage, etc.) ne fera que vous rendre aveugle à cette réalité. Vos écoles, vos élèves, les parents et les professeurs de votre communauté y sont déjà. Le seul moyen d’influencer le message, c’est d’y être aussi. Car la bête apprivoisée peut devenir puissante.
Deuxième leçon
Les gens travaillent pour vous, il faut travailler avec eux. Les gestionnaires des commissions scolaires, les directions d’école, les professeurs, les parents et les élèves travaillent pour vous, ils constituent votre identité numérique, partagent les photographies des activités de l’école, recrutent des partisans pour vos équipes sportives et sont vos meilleurs vendeurs. Vous avez la chance d’avoir des armées « d’évangélistes » qui ne réclament qu’un peu de reconnaissance pour mousser la réputation de vos institutions. Il faut savoir miser sur ce capital humain; ça ne coûte qu’un peu d’ouverture et de soutien moral. Vous pouvez aussi vous y mettre, en les aidant à aller plus loin, à faire un meilleur travail (votre site Internet permet-il d’inviter les « amis » Facebook à une activité? De partager une nouvelle avec d’autres amis?).
Troisième leçon
Ce n’est pas parce que vous ne le voyez pas que ça n’existe pas. Il faut savoir mettre en place des observatoires le long des inforoutes, pour voir venir et influencer stratégiquement. Il y aura des feux à éteindre, des dossiers peu reluisants, mais avec une bonne stratégie de veille, vous serez en mesure de prévenir plus que de guérir.
Quatrième leçon
Le meilleur dilue le pire. Une fois votre réflexe numérique développé sur les réseaux sociaux, vous comprendrez rapidement qu’une identité numérique forte, positive et sympathique facilitera la gestion de problèmes beaucoup plus complexes : du recrutement d’élèves, au recrutement de personnel en passant par les relations avec les médias. Une présence forte permettra une plus grande influence et facilitera la résolution de crise de façon surprenante.
En éducation, la seule chose permanente est le changement
Il faut bien comprendre qu’on fait ici face à une nouvelle réalité, inventée par une génération qui n’a pas les mêmes réflexes que leurs ainés. Il faut aussi comprendre que ça bouge encore beaucoup et que les apprentissages sont encore nombreux pour tous. Les jeunes savent rapidement qu’il n’est pas à leur avantage de présenter une image numérique étrange ou déplacée, ils comprennent également rapidement les mécanismes qui permettent de réguler cette image et de la façonner selon leurs objectifs. Nous avons beaucoup à apprendre d’eux, mais on ne peut ignorer les bases de cette nouvelle réalité.
Auteur: Carl-Frédéric De Celles
Président d’iXmédia
