Le thème de ce deuxième BarCamp Ludovia (le premier a eu lieu mardi soir) a fait l’objet de quelques discussions depuis les annonces de l’avant-programme. Comme je participe aux BarCamp de Ludovia depuis que l’expression est apparue, je peux témoigner que la formule tend à privilégier le fait qu’aucun des participants ne soit spectateur. En ce sens, les animateurs ont voulu que le thème soit le plus engageant possible: «Comment introduire l’apprentissage par les jeux dans les pratiques pédagogiques?»
La question était posée.
L’activité débute donc par les consignes de base: on cherche à identifier des questions qui peuvent se répondre par «oui» ou par «non»… qui poseraient bien les enjeux du jeu et des apprentissages.
Une bonne vingtaine de questions ont rapidement surgi, ce avec bien moins de résistance qu’aux autres BarCamp où le délai avant de se mettre véritablement à la tâche était plus long. Une fois constaté que nous avions suffisamment de matériel pour échanger, les animateurs ont tenté de regrouper les questions sous quatre thèmes qui ont semblé faire l’unanimité:
– La valeur ajoutée du jeu à la pédagogie
– La culture du jeu et des formateurs
– Production du jeu
– La légitimité du jeu dans les pratiques pédagogiques
Je me souviens d’avoir noté, «les chercheurs sont difficiles à séparer… Pourtant, ils gagneraient à «infiltrer» chacun des groupes! Reste que chacun travaille fort et les discussions vont bon train…
Au bout d’une vingtaine de minutes de partage animé, on revient en plénière et quatre questions sont retenues (une par groupe) et présentées à l’ensemble des participants. Pendant la discussion et le retour en plénière, plusieurs internautes présents gazouillent des bribes de conversation et les gens, à distance, continuent à leur façon. En tant que rapporteur, je jette un oeil à Twitter et réponds à ceux qui posent des questions.
Le premier groupe à présenter le fruit des délibérations insiste sur l’importance de l’apport du transfert des connaissances à travers le jeu. Selon eux, la valeur pédagogique du jeu est liée à l’objectif pédagogique défini au départ. Le jeu doit s’inscrire dans une séquence plus large, il doit motiver les élèves (en particulier ceux qui se sentent «moins bons»). La question retenue et soumise au vote est celle-ci:
«Le jeu du vote a-t-il une valeur pédagogique?
Une majorité de participants répond à l’affirmative…
Le rapport du second groupe débute avec la reconnaissance de la puissance du jeu. Quelques préoccupations émergent:
– Comment dépasser le constat que les jeunes jouent et s’éclatent alors que les profs leur courent après pour les rattraper?
Quelle est la culture ludique en pratique, quel apport du savoir informel?
L’avant et l’après la bombe numérique (comme il y a eu l’avant et l’après la bombe atomique?
La reconnaissance des compétences acquises dans le jeu?
Les acquis du milieu enseignant : les faire jouer? Les faire interviewer leurs élèves?
L’école est-elle à ce point un système réglé ?
La question soumise aux participants surprend. Elle est celle qui a été «retwittée» le plus souvent dans les quatre soumises:
«Peut-on demander aux enseignants de rassembler leur carrière de joueur pour se hisser au statut de joueur de leur propre rôle, de maître du jeu de la classe, pour réconcilier les deux générations et reconnaître le grand jeu de l’apprentissage ? (celle Twitté: Peut-on demander aux enseignants de remobiliser le joueur qu’ils étaient petits et redevenir sensibles et reconnaître le « grand jeu de l’apprentissage »)»
Entre l’intervention du porte-parole du deuxième groupe et celui du troisième, j’ai noté deux mots qu’il me fallait conserver: «Utile ou futile, le jeu? Bon… on y reviendra.
Je note tout de suite que la question soumise par ceux qui travaillaient sur le thème «production du jeu» était «l’Éducation nationale doit-elle créer un pôle sur le game design?» À 57%, on a répondu oui à cela. En amont, les gens dans ce groupe de travail ont noté la frustration des profs de ne pas pouvoir se dégager du temps pour ce genre de projet. Bien sûr on a cherché à savoir qui finance, quels acteurs s’investissent, qui forment les enseignants? Autant de préoccupations qui ont conduit à la troisième question soumise.
Le dernier groupe devait s’attaquer à gros, «La légitimité du jeu dans les pratiques pédagogiques». Les parents pour qui jouer est incompatible avec apprendre et qui se pose la question du temps-écran, on fait quoi avec eux?
Pour les enseignants, quels jeux choisir? Quels jeux sont adaptés à l’objectif d’enseignement? Comment faire face au décalage culturel dans la pratique ludique entre les enseignants et les élèves ? Et les cadres scolaires, les arguments d’autorité sont-ils acceptables?
Ensuite quand on se tourne du côté des élèves, ne pourrait-on pas les rendre vraiment acteurs en créant les jeux avec eux? Le jeu ne rend-il pas le reste du travail d’enseignement-apprentissage rebutant… et risquant même de nier le plaisir d’apprendre? Tous les élèves peuvent-ils être réceptifs à la pédagogie par le jeu? Et puis, un peu de provocation… «Nos « Digital Natives » ont-ils vraiment envie de jouer pour apprendre … ou plutôt d’apprendre en jouant?
Intégrer le jeu dans l’école, n’est-ce pas formaliser le jeu?
La question soumise maintenant: «Est-ce que c’est sérieux de s’amuser? (69% disent «oui»!) ou encore, «Être sérieux en s’amusant, bluffant oui ou non?
J’ai eu envie de citer un tweets en provenance de l’extérieur en guise de conclusion… «À l’école, faut que les profs s’amusent, sinon les élèves ne s’amuseront pas.» @cjacomino
Satisfait de l’exercice, le BarCamp se termine avec un nombre époustouflant de nouveau «follower» Twitter, signe que plusieurs internautes font de la veille sur ce sujet.
N.B. À l’occasion du débriefing, un intervenant a soumis la réflexion suivante (il était tard): «Un perdant a été un gagnant potentiel qui a eu sa chance; de quoi de plaint-il?»
N.N.B. Un copain du Québec vient de publier un billet qui me paraît bien cadrer avec le contenu de ce BarCamp: «L’efficacité des jeux et des simulations sur l’apprentissage»
Mise à jour du lendemain: Ce texte a également été publié sur le blogue de Ludovia et quelques photos l’accompagne…
Tags: "La vie la vie en société" "Pédagogie et nouvelles technologies" LesExplorateursduWeb Partageons le savoir « Ludovia 2010 »
Bonjour Mario,
Trop pris par ma rentrée je n’ai pas pu suivre les échanges de Ludovia mais je découvre ton billet et je me permet de renvoyer vers quelques productions de mon équipe sur le jeu :
– Qu’apprend t-on en jouant ?
Jeux sérieux : peut-on apprendre les mathématiques en détruisant des zombies ?
http://revue.sesamath.net/spip.php?article213
Sanchez, E., & Jouneau-Sion, C. (2009). Playing in the Classroom with a Virtual Globe for Geography Learning. In T. Jekel & A. Koller & K. Donert (Eds.), Learning with Geoinformation IV (pp 78-86). Heidelberg: Wichmann.
http://eductice.inrp.fr/EducTice/projets/geomatique/telechargement/GI_sanchez_Jouneau.pdf
– Comment intégrer le jeu dans les pratiques pédagogiques ?
http://eductice.inrp.fr/EducTice/projets/geomatique/jeu-et-apprentissage/guide
– Sur les questions de l’intégration du jeu dans les pratiques pédagogiques
Sanchez, E., & Prieur, M. (2008). Spore, un jeu sérieux pour comprendre l’évolution biologique ? Les Dossiers de l’Ingénierie Educative CNDP (65) 18-21.
http://comenius.blogspirit.com/archive/2009/05/08/spore-un-jeu-serieux-pour-comprendre-l-evolution-biologique.html
Tu peux rentrer au Québec, il y a du soleil entre les averses !
Merci pour ton billet, Eric
Bonjour Mario!
Le lien de votre N.N.B. ne fonctionne plus.
Merci pour ce bon compte-rendu.
Merci de m’avoir signalé ce fait. Le logiciel de blogue qu’utilise M. Giroux laisse les accents dans les URL et ça cause problème parfois. J’ai utilisé un «raccourcisseur». Ça devrait aller maintenant.