N.B. Ce billet est issu d’une série de seize qui identifient des raisons de se doter d’un Ordre professionnel des enseignantes et des enseignants au Québec. L’auteur est René Larouche, professeur retraité de l’Université Laval ayant comme principal champ d’intérêt la sociologie des professions. Je lui offre cet espace de mon blogue parce que j’endosse son travail.
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La présence d’un Ordre des enseignantes et des enseignants permettra de mieux décrire ce qu’est un véritable acte professionnel d’enseigner.
« L’acte professionnel d’enseigner consiste à favoriser les divers apprentissages de l’élève pour atteindre les objectifs de formation définis par les programmes d’études et le milieu scolaire local, c’est-à-dire : poser un diagnostic sur les besoins des apprenantes et apprenants, mettre en place les conditions les plus favorables aux apprentissages, choisir les modes d’intervention appropriés et évaluer les acquis. » (Conseil pédagogique interdisciplinaire du Québec, La profession en marche , Bulletin d’information du CPIQ sur l’ordre professionnel des enseignantes et des enseignants au Québec. Numéro 4, octobre 1999, p.1)
L’Ordre des enseignantes et des enseignants pourra déterminer les conditions nécessaires au maintien de la compétence professionnelle et les faire respecter. « Les statistiques officielles du ministère de l’Éducation montrent que plus du tiers des enseignants sont contraints d’enseigner dans des matières pour lesquelles ils n’ont pas de formation adéquate. Pourtant, les enseignants devraient être en mesure d’exiger qu’on leur permettre d’acquérir les compétences requises pour assumer les tâches éducatives qui peuvent leur être confiées au cours de leur carrière. L’Ordre professionnel pourra déterminer les conditions nécessaires au maintien de la compétence professionnelle des enseignants par des politiques de formation continue élaborées par et pour les enseignants eux-mêmes. » (Source : Conseil pédagogique interdisciplinaire du Québec, La profession en marche , Bulletin d’information du CPIQ sur l’ordre professionnel des enseignantes et des enseignants au Québec, Numéro 2, mai 1998, p.1)
« Le portrait de l’OPQ sur l’encadrement normatif de la pratique dans le réseau scolaire, reflète qu’effectivement dans le milieu de l’éducation, comme dans celui de la santé par exemple, les fonctions des établissements et des instances décisionnelles correspondent à divers encadrements et à divers règlements opérationnels existants. Mais cet éparpillement des cadres de référence et des règlements qui « contrôlent » l’exercice d’enseigner est justement un des principaux éléments de la problématique de la pratique actuelle de la profession enseignante : une profession soumise à une multitude de règlements et d’intervenants auxquels elle doit se référer. Cette complexité explique aussi un certain manque de cohérence et plusieurs lacunes et faiblesses déjà signalées dans le système d’éducation à ce niveau.
L’importance et le caractère unique des normes d’exercice d’une profession, c’est justement de vouloir garantir, dans tous les milieux et en tout temps, la protection du public et de garantir notamment la qualité des actes professionnels. Les normes de pratique d’une profession ne peuvent donc être soumises à des interprétations et à des adaptations variables selon les milieux scolaires, et encore moins faire l’objet ou résulter de négociations influencées par divers contextes économiques et politiques, par un rapport de force patronal – syndical selon la conjoncture ou par les diverses tractations que de telles négociations peuvent susciter. La qualité de l’enseignement ne peut et ne doit pas être négociable! De plus, en aucun temps la nature et les composantes d’un acte professionnel ne peuvent être à la merci des résultats fluctuants de négociations collectives périodiques. C’est plutôt à l’acte professionnel, clairement défini par la profession, d’inspirer les négociations et la convention collective elle-même. Il est bon d’ajouter que, quel que soit le « projet éducatif » ou la vocation particulière qu’une école puisse se donner pour l’ensemble ou pour certains de ses élèves, les mêmes normes de pratique de la profession enseignante devraient pouvoir s’appliquer. Par ailleurs, un code d’éthique, par sa nature même, ne peut être imposé d’autorité à des individus. Il doit plutôt s’appuyer sur l’engagement personnel et collectif à le respecter de la part de chacun des membres d’un Ordre professionnel. Un tel engagement personnel sera beaucoup plus efficace que n’importe quel règlement imposé par une autorité scolaire.
L’évaluation de la compétence professionnelle d’un enseignant doit se référer aux normes de pratique et au code d’éthique de la profession et dépendre de l’entité qui gère la profession, c’est-à-dire l’Ordre professionnel. C’est une question d’objectivité, d’expertise, d’efficacité et de crédibilité que n’offrent pas les organisations patronales et syndicales liées par des négociations collectives, par des rapports de force et par des interrelations multiples au plan local, régional et provincial. À cet égard, l’article de la loi de l’instruction publique, qui traite des devoirs éthiques d’un enseignant, ressemble à une série de vœux pieux et imprécis, quoique bien intentionnés, mais sans mécanismes d’application efficaces, objectifs et crédibles, alors qu’il suppose des recours non crédibles au niveau politique des conseils de commissaires, voire même au niveau du ministre. » (Conseil pédagogique interdisciplinaire du Québec, L’intersection, Volume 20, numéro 2, mai 2002, p. 8)
Un Ordre des enseignantes et des enseignants répondra de façon adéquate à leur besoin d’une éthique professionnelle :
« Un seul article dans la loi sur l’Instruction publique indique quelques obligations professionnelles, d’ordre général, pour les enseignants. En aucun cas cela ne peut être considéré comme un code d’éthique professionnel. En effet, un code d’éthique ou de déontologie, est élaboré par les professionnels eux-mêmes, il indique clairement les contenus et les limites des engagements et les diverses responsabilités du professionnel, en plus de prévoir des mécanismes d’application et une gestion des cas par des pairs, ce qui en garantit l’équité, la validité et la crédibilité. L’Ordre professionnel des enseignants aura comme importante responsabilité d’élaborer un code d’éthique et de s’assurer qu’il soit appliqué et respecté par les enseignants, mais aussi qu’il soit pris en compte par l’ensemble des autres intervenants scolaires. » (Conseil pédagogique interdisciplinaire du Québec, La profession en marche , Bulletin d’information du CPIQ sur l’ordre professionnel des enseignantes et des enseignants au Québec. Numéro 2, mai 1998, p.1)
Aussi, la présence d’un Ordre des enseignantes et des enseignants permettra de mieux décrire ce qu’est un véritable acte professionnel d’enseigner.
« L’acte professionnel d’enseigner consiste à favoriser les divers apprentissages de l’élève pour atteindre les objectifs de formation définis par les programmes d’études et le milieu scolaire local, c’est-à-dire : poser un diagnostic sur les besoins des apprenantes et apprenants, mettre en place les conditions les plus favorables aux apprentissages, choisir les modes d’intervention appropriés et évaluer les acquis ». (Conseil pédagogique interdisciplinaire du Québec, La profession en marche , Bulletin d’information du CPIQ sur l’ordre professionnel des enseignantes et des enseignants au Québec. Numéro 4, octobre 1999, p.1)
Un mot sur l’inspection professionnelle…
« Les témoignages recueillis démontrent presque tous que la compétence professionnelle des enseignants ne fait pas l’objet d’une véritable évaluation et, à plus forte raison, d’un encadrement ou d’un suivi. Pourtant, l’impact de la compétence professionnelle des enseignants sur la formation de leurs élèves est déterminant. Dans quelques cas lors de la consultation du CPIQ, on a mentionné seulement une formule de type « dialogue pédagogique » entre la direction et les enseignants au primaire. En tenant compte des multiples témoignages reçus, le slogan des enseignants pourrait être : « Compétent un jour, compétent toujours! », ce qui laisse perplexe en l’absence d’accès à la formation continue adéquate et spécifique pour un grand nombre d’entre eux, sans statut de permanents. C’est une telle situation qui peut expliquer que des préjudices à répétition puissent toucher les élèves successifs de certains enseignants incompétents.
Étant donné qu’aucune formule actuelle d’évaluation professionnelle des enseignants n’existe vraiment de façon générale, l’inspection professionnelle permettrait d’améliorer grandement la garantie de compétence et d’intégrité des enseignants. Elle permettrait d’abord, de façon préventive et aléatoire, de mesurer la qualité des services d’enseignement dans un échantillon d’établissements choisis au hasard chaque année. À cela s’ajouteraient la validation et le traitement des plaintes formulées, de façon ponctuelle, en regard du non-respect des normes de pratique ou du code d’éthique en enseignement. Ajoutons que les contrôles dans les milieux scolaires sont exercés surtout en fonction de la convention collective et des règles concernant les relations de travail d’une part et d’autre part en fonction des politiques et règlements concernant la gestion organisationnelle et pédagogique d’un établissement. Les contrôles qui en découlent portent essentiellement sur des cas à caractère disciplinaire plutôt que sur des cas d’incompétence professionnelle. » (Conseil pédagogique interdisciplinaire du Québec, L’intersection, Volume 20, numéro 2, mai 2002, p.8-9)
Évidemment, tout cela pourrait changer si « une réelle démarche d’évaluation professionnelle des enseignants » était mise en place à l’échelle du réseau de l’éducation. Le rôle joué par l’Ordre professionnel devrait être défini. Il y a un bel espace pour ce faire… Ajoutons quelques perspectives au niveau structurel…
Comité de l’inspection professionnelle
Le représentant de la fonction de l’inspection professionnelle sera un enquêteur du comité de l’inspection. Cette fonction comprend les activités requises pour que l’Ordre des enseignantes et des enseignants s’acquitte de la surveillance de l’exercice de la profession par les membres. Elle comprend non seulement les visites de surveillance, mais aussi les enquêtes particulières sur la compétence des membres de l’Ordre. Comité d’inspection professionnelle (selon un échantillonnage au hasard, 20% du nombre de membres par année sur un cycle de 5 ans)
- Au moins trois membres nommés par le bureau. Il peut s’adjoindre des experts;
- Membres du comité, enquêteurs et inspecteurs, sont membres de l’Ordre;
- Le comité informe le syndic de l’Ordre de toute infraction constatée;
- Le comité peut obliger à faire un stage, limiter ou suspendre le droit d’exercice;
- Le comité surveille l’exercice de la profession et fait enquête à la demande du bureau ou de sa propre initiative.
La surveillance disciplinaire
« Le portrait très succinct de la réalité actuelle décrite par l’OPQ montre, de façon éloquente, que la surveillance disciplinaire est très peu traitée dans le système scolaire actuel quoique des mécanismes inappropriés existent pourtant qui offrent des recours à un niveau politique pour résoudre les problèmes à régler, sans pour autant que les conseils des commissaires n’ait ni la compétence, ni la crédibilité pour le faire. Le recours au ministre, en particulier, qui devrait répondre à des cas d’une certaine gravité, est à toute fin pratique inopérante puisque seulement quelques cas à caractère disciplinaire sont traités chaque année à ce niveau dans une profession qui regroupe pourtant près de 80 000 membres.
Le système professionnel comblerait un vide évident dans le système de surveillance disciplinaire actuel, tout d’abord en instaurant des normes de pratique et un code d’éthique d’où découlerait la définition des fautes professionnelles, ce qui fournirait un cadre de référence essentiel à un système disciplinaire réel, efficace et crédible. Les intervenants politiques, commissaires élus des commissions scolaires et ministre de l’Éducation, n’ont pas l’expertise ni la crédibilité pour juger d’un manquement aux normes de pratique ou d’éthique d’un enseignant. Ce sont des responsabilités qui devraient plutôt relever de la profession elle-même et de ses membres, comme nous l’avons déjà souligné.
Le système disciplinaire de l’Ordre professionnel s’appliquera essentiellement dans le cas de comportements contraires à la pratique faisant l’objet de plaintes qui ne pourraient ou qui ne seraient pas traitées au niveau de la direction d’école en application de la convention collective. Précisons de plus que les normes de pratiques et les normes éthiques ainsi que la définition de la compétence et de l’incompétence professionnelles ne peuvent être le résultat de négociations collectives périodiques. C’est pourquoi la convention collective n’est pas une référence appropriée pour juger les cas relevant des normes de pratique qui doivent être définies par la profession elle-même, dans l’intérêt du public, et non par le résultat des négociations défendant des intérêts corporatistes, par ailleurs légitimes, pour définir les relations de travail. La raison d’être d’une convention collective est effectivement de baliser les relations de travail. Elle n’a aucunement comme objet de garantir, de quelque façon que ce soit, la compétence professionnelle de ses syndiqués. »(Conseil pédagogique interdisciplinaire du Québec, L’intersection, Volume 20, numéro 2, mai 2002, p.9)
Le comité de discipline
- Le comité de discipline est saisi de toute plainte formulée contre un professionnel pour une infraction au Code des professions ou à la loi ou aux règlements de l’Ordre;
- Formé au moins trois membres de l’Ordre dont un président qui est désigné par le gouvernement parmi des avocats ayant au moins dix ans de pratique;
- Tout le dossier doit être accessible à la personne qui en demande l’accès;
- Le bureau nomme, parmi les membres de l’Ordre, un syndic et des syndics adjoints qui peuvent s’adjoindre des experts;
- Le syndic peut faire enquête sur l’information d’une infraction éventuelle;
- Le syndic informe le demandeur d’enquête de sa décision de porter ou non une plainte devant le comité de discipline ou de transmettre la demande au comité d’inspection professionnelle;
- La plainte peut être liée à une ordonnance de non-publication.
Les recours disciplinaires
La fonction des recours disciplinaires regroupe les activités de l’Ordre des enseignantes et des enseignants du Québec qui visent à assurer le traitement de tout litige relatif à toute plainte formulée contre un professionnel pour une infraction au Code des professions, à la loi constituante ou aux règlements de l’ordre. Cette fonction regroupe donc à la fois les responsabilités du syndic en matière de traitement, d’analyse et de référence des demandes d’information, des demandes d’enquête et des plaintes, les activités du comité de révision, du comité de discipline et du conseil d’arbitrage. Le comité de l’admission à la pratique de l’Ordre des enseignantes et des enseignants du Québec gère donc l’examen des candidatures au stage de deux ans après l’obtention d’un diplôme reconnu ainsi que l’examen des demandes d’équivalence de diplômes ou de formation, y compris les demandes des candidats formés hors-Québec.
Le comité de révision
- Au plus sept personnes nommées par le bureau dont au moins deux parmi les administrateurs nommés par I’OPQ;
- La personne qui a demandé au syndic la tenue d’une enquête peut demander l’avis du comité de révision lorsque le syndic a décidé de ne pas porter plainte;
- Le comité peut confirmer la décision du syndic ou demander de compléter l’enquête ou autres, ou de suggérer la conciliation.
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