Note : Ce billet a d’abord été publié au Journal de Québec dans la section « blogue ». Il reprend une chronique publiée dans les versions imprimées du Journal de Québec / de Montréal.
L’intégration scolaire des élèves handicapés ou en difficulté d’adaptation ou d’apprentissage (HDAA) dans les groupes-classes prend une tournure dramatique: la classe régulière existe de moins en moins. Trop souvent, elles sont devenues des classes spéciales déguisées en classes ordinaires, sans les ressources spécialisées qui y seraient nécessaires et sans le ratio prof/élèves des classes d’adaptation.
Les enseignants font vite leur deuil d’un groupe où les élèves auraient à peu près tous les mêmes capacités de concentration et appétits à apprendre. Ils composent avec des jeunes qui n’apprennent pas au même rythme, la même chose, en même temps.
Plusieurs événements récents démontrent que certains milieux scolaires n’en peuvent plus. Des détails manquent, mais ces événements sont le symptôme de l’augmentation déroutante du nombre de cas très particuliers. Des approches personnalisées seraient requises, mais les écoles régulières sont incapables d’être des milieux spécialisés à ce point.
Un enseignant sait regrouper des élèves ayant des caractéristiques communes et compose avec des sous-groupes dans sa classe. Si un seul plan de match ne suffit plus devant les 25 élèves d’une classe régulière, l’enseignement individualisé et l’attention personnalisée de tous les instants… il faut oublier ça!
L’intégration sauvage
On dit de l’intégration qu’elle devient «sauvage» quand des élèves aux besoins très particuliers sont dans des groupes où le manque de services et de personnel spécialisés, où le manque de matériel pédagogique adapté et où le manque de préparation et de formation d’un enseignant forcent la désintégration du climat de la classe.
Entre «l’intégration à tout prix» et «l’intégration jamais de la vie», une palette de solutions existe.
L’intégration réussie
La médaille de l’intégration réussie a deux côtés:
1-L’enfant «intégré» reçoit en quantité et en qualité les services dont il a besoin;
2-L’enfant «régulier» ou «particulièrement doué» n’est pas pénalisé par le fait que sa classe compte des élèves HDAA.
Les attentes des parents d’un enfant HDAA sont celles de n’importe quel parent. C’est un parcours du combattant que d’apprendre à vivre avec le handicap de son enfant. On demande à être soutenu et compris. Intégrés ou pas, ces enfants ont des besoins, et les ressources adéquates doivent être mises à contribution.
Combler les attentes de tous les parents est inconciliable avec une politique en adaptation scolaire qui vise la réussite scolaire de tous les élèves selon le potentiel de chacun. Certaines attentes s’affrontent. Les autorités doivent faire des choix conformes à la Loi sur l’instruction publique. On doit resserrer les critères de classement des élèves HDAA pour permettre une intégration réussie.
L’enthousiasme de certains militants qui veulent à tout prix imposer un modèle d’intégration totale va au-delà de ce qui est humainement et scientifiquement possible. La discussion rationnelle est souvent remplacée par un débat où il y aurait des bons (plus d’intégration) et des méchants (moins d’intégration). Le climat d’affrontement débouche sur des choix bureaucratiques lourds que les décideurs et leurs gestionnaires masquent derrière des formules creuses.
Intégrer des classes régulières est souvent devenu impossible puisqu’elles n’ont de régulière que le nom.
N.B. À moi et à Réjean Parent, le Journal avait demandé de répondre aux questions suivantes : « Sommes-nous prêts, comme société, à faire face à l’augmentation notable du nombre d’enfants autistiques et HDAA? Et surtout, sommes-nous prêts à les accueillir à l’école et à les intégrer dans des classes dites normales? »
Mise à jour : Je constate que mon collègue Réjean a écrit un billet qui constitue une réaction au mien… À lire : « La classe écrémée ».
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