Note : Ce billet a d’abord été publié au Journal de Québec dans la section « blogue ».
Rien de bien nouveau dans le fait que des étudiants(es) et des professeurs à l’université tombent en amour. Mais force est d’admettre que les événements des dernières semaines donnent un éclairage différent «au phénomène».
Les organisatrices du colloque Sexe, amour et pouvoir ne pouvaient prévoir avant la tenue de leur événement qu’une association étudiante de l’UQAM publie sur Facebook les noms de trois professeurs «montrés du doigt pour des gestes s’apparentant à du harcèlement sexuel» (source). L’initiative de Martine Delvaux, de Laurence Pelletier et de Valérie Lebrun tombe pile, même s’il contribue au climat de tension actuel à l’UQAM…
Ce matin, Pierre Foglia débute sa chronique en traitant du sujet, sous l’angle des effets pervers de la délation :
«Chaque fois que la délation est érigée en système, chaque fois, forcément, elle sert à de tragiques règlements de comptes.»
Une bien mauvaise façon d’aborder la question des attirances sexuelles entre étudiants(es) et professeurs. On voudrait éviter de parler de la responsabilité des professeurs d’université qu’on ne ferait pas mieux…
De mon point de vue, c’est LA question qui se pose quand une aventure amoureuse débute : quel est la responsabilité du prof ?
Il faut se rappeler que le professeur a du pouvoir sur l’étudiant(e). Il peut faire la différence dans la réussite ou non du cours que l’étudiant(e) est en train de suivre. Sa liberté académique l’autorise à décider du rendement de l’étudiant(e). Il n’a pas le droit d’ouvrir la porte du flirt…
Si l’attirance mutuelle existe, elle doit être refoulée, gérée et rendue inopérante. C’est la responsabilité du professeur. C’est une question de jugement. Il n’y a pas de consentement possible…
Je ne conçois pas que la proximité et la mutualité requise pour qu’il y ait transmission de connaissances puissent permettre qu’un professeur ouvre la porte de la séduction.
S’il y a une vraie histoire d’amour à venir, elle doit attendre. Un(e) professeur ne devrait jamais être placé(e) dans la situation où il(elle) donne des signes d’intérêt à une aventure amoureuse pendant qu’un(e) étudiant(e) chemine dans sa faculté universitaire.
Je ne suis évidemment pas à l’aise avec les façons de procéder du collectif féministe Les Hystériques. Si certaines vont trop loin, c’est inquiétant, mais ça ne doit pas contribuer à nous distraire de l’essentiel. Trop d’attention sur les dérapages de certains mouvements étudiants risque de mettre au second plan le grand pouvoir des professeurs lorsque survient une romance, du harcèlement ou une agression. C’est sur ce point qu’il faut concentrer la recherche de solutions.
Pour pouvoir enseigner en paix, il faut se montrer irréprochable sur le plan du désir sexuel envers ceux et celles à qui on veut faire apprendre.
Les étudiants(es) peuvent entretenir tous les fantasmes qu’ils veulent, voire, manifester leurs envies d’aller au lit avec leur prof, c’est la responsabilité de ce dernier de composer avec la situation.
Je sais bien que les étudiants(es) ont des responsabilités dans ce qui peut arriver, mais les directions de nos universités doivent saisir au bond l’occasion de la présente turbulence pour mieux protéger tout le monde.
Je ne vis pas dans une bulle. Je sais bien qu’on ne peut pas tout éviter quand on est professeur. Mais je crois fermement que les codes doivent être très clairs avec les étudiants(es) pour que les apprentissages soient bien servis : «comme professeur, je ne suis pas ouvert(e) au sexe avec toi et si familier, comique, chaleureux, emphatique, conciliant, avenant, gentil, etc. que je sois, il n’y a aucune possibilité que je sois attiré(e) sexuellement par toi» !
Si ça doit se traduire par l’adoption d’un code d’éthique du genre de ceux que certains professionnels ont… je suis POUR.
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