Note : Ce billet a d’abord été publié au Journal de Québec dans la section « blogue ».
Le projet de Théâtre Le Diamant à la place D’Youville à Québec a souvent fait l’objet de spéculations, ces dernières années. Le grand dramaturge de réputation internationale Robert Lepage et son groupe de travail Ex Machina sont à l’origine de ce projet de construction d’une salle de spectacle de 650 places qui se voulait un lieu inédit pour présenter les meilleures créations mondiales dont celles du Carrefour international de théâtre.
Annoncé en grande pompe en juillet 2012, ce qui se voulait à l’origine «un lieu de diffusion culturelle doté d’équipements à la fine pointe des besoins des créations contemporaines» ne se concrétisera peut-être pas comme prévu puisque le financement du projet bat de l’aile.
Je pose la question en titre de ce billet parce que j’ai souvent entendu lors de la dernière campagne électorale que si on était contre le financement public du projet Le Diamant, on devenait ipso facto contre l’oeuvre du géant Robert Lepage. J’étais de ces candidats de la Coalition Avenir Québec, amoureux des oeuvres de Lepage, qui affirmaient que dans les circonstances, il n’était pas possible d’assurer le financement public requis. En débat au printemps dernier, les représentants du Parti libéral en particulier, ne se gênaient pas pour promettre la lune aux gens de Québec et le ministre responsable de la Capitale-Nationale assurait, même rendu en juin dernier, que le financement du Théâtre Le Diamant serait au rendez-vous.
Ça vaut la peine, je crois, d’essayer de voir ce qui s’est passé depuis juillet 2012, et si Robert Lepage doit revoir sa stratégie, ou même se remettre en question. Lui aurait-on fait de fausses promesses?
Je ne suis pas le premier à poser la question du rôle que pourrait avoir joué Robert Lepage dans les difficultés à financer son projet puisqu’un appui accordé à Pauline Marois peu de temps après l’annonce du financement public en 2012 des libéraux avait soulevé la même question chez des journalistes. On disait que non, à l’époque, les penchants politiques de M. Lepage n’avaient rien à voir avec les appuis à ses projets…
Depuis cet épisode, en septembre 2013, c’est du côté de Régis Labeaume que les critiques sont venues: le projet Le Diamant est trop coûteux ! En novembre de la même année, on apprenait que le projet passait de 61 millions de dollars à 53,6 M$.
Du côté de la portion privée du financement, on avait annoncé que 10 M$ seraient trouvés en un an par «deux poids lourds» (Monique Leroux, pdg de Desjardins, et Jacques Ménard, président de BMO Groupe Financier). Onze mois plus tard, certains ont peut-être raison d’être inquiets…
La Ville de Québec n’a pas inscrit dans les investissements prévus au programme triennal d’immobilisations (PTI) 2015-2017 qui viennent d’être dévoilés les 4 MS qu’elle avait prévu pour financer Le Diamant. «J’attends les informations (du gouvernement)» a spécifié le maire…
Tout le monde ont-ils lâché Robert Lepage en même temps ou, comme l’affirme Gérard Deltell, tout le monde réalisent en même temps «qu’on n’a pas les moyens de se le payer»?
Je serais porté vers la deuxième option.
On disait en 2012 que Ex Machina, la compagnie de création de Robert Lepage, avait déjà allongé «3 millions de dollars pour le projet» (source). Trois bâtiments avaient été acquis à l’automne 2011, grâce à la collaboration à la hauteur de 4,25 M$ de Fondaction.
Je ne sais pas ce qui est advenu du concours d’architecture lancé en mai 2014, mais les dernières nouvelles sur le financement public du projet force la remise en question de l’ensemble de ce qui avait été annoncé. Je ne crois pas que Robert Lepage et ses prises de position politique des dernières années soient en cause, ni évidemment, la notoriété de sa création.
Mais plusieurs politiciens devront peut-être cesser de se faire du capital politique avec le nom de ce grand créateur avec des annonces faites trop précipitamment.
Robert Lepage doit obtenir l’heure juste dans les meilleurs délais pour qu’enfin, avec son équipe, il puisse prendre les décisions qui s’imposent pour son projet.
Bien hâte de lire Marc Cassivi de La Presse sur le sujet. Habitué de casser du sucre sur le dos de François Legault, je ne serais pas étonné qu’il trouve le moyen de le blâmer pour ce qui arrive, même si la CAQ a été la seule des formations politiques à ne pas mentir au grand Robert Lepage…
Ajout du lendemain : La campagne de fonds privé est en suspend d’ici la décision officielle du gouvernement libéral, dit-on.
Mise à jour du 15 décembre 2014 : La participation du secteur privé ne serait pas celle attendue ce qui expliquerait l’hésitation du gouvernement Couillard à débloquer les fonds. Un article au Journal précise d’ailleurs que le contrat de 30 M$ (Robert Lepage invoquait récemment son existence) aurait été signé par le PQ, «trois jours après les dernières élections générales».
Mise à jour du 4 mars 2015 : Le Capitole fermera les restaurants Chez L’Autre et Il Teatro Pizzeria à la fin avril, «les délais qui s’allongent dans le projet du Diamant expliquent en grande partie ces deux fermetures». Le Cabaret du Capitole fermera aussi ses portes. De son côté, Philippe Couillard affirme qu’il «veut que ça marche», le projet Diamant.
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