Note : Ce billet a d’abord été publié au Journal de Québec et au Journal de Montréal dans la section du blogue des «spin doctors».
Vu du Québec, on comprend depuis quelques jours que le drapeau confédéré fait partie de ces symboles qui divisent les gens, en particulier dans le Sud des États-Unis. La terrible tuerie de Charleston où neuf Noirs ont été assassinés ramène à l’avant-plan le fait que pour progresser, certaines décisions difficiles doivent être prises pour le bénéfice du plus grand nombre.
Je ne suis pas en train d’écrire un texte dont les mots viennent facilement.
Établir une sorte de parallèle entre la sortie du député de Deux-Montagnes qui demande la dépolitisation de la Fête nationale et l’appel de la gouverneure républicaine Nikki Haley à retirer le drapeau confédéré est risqué, je le conçois.
La charge affective liée au fait d’entendre et de lire les messages indépendantistes à l’occasion des célébrations entourant le 24 juin est à des lunes des tensions qui accompagnent le fait d’exhiber encore aujourd’hui un des symboles du passé esclavagiste aux États-Unis.
Il faut toutefois reconnaître l’inconfort d’une portion très importante de la population quand on tente sans subtilité de taper sur le clou de l’indépendance du Québec le jour même où on veut célébrer la fierté d’être Québécois.
C’est en ce sens que je fais référence à la demande de retrait du drapeau confédéré. On n’a pas écouté avec le temps l’inconfort d’une grande partie de la population. Je répète : on est loin de demander le retrait de quoi que ce soit. Mais l’inconfort est grandissant, dans ces conditions où on ne se reconnaît plus dans le principal message de La Fête !
On n’a pas à être gêné de l’affirmer : fêter le Québec et les Québécois, c’est célébrer ce qui nous unis, pas ce qui nous divisent.
On exagère quand on veut réduire au silence ceux qui tiennent absolument à maintenir leurs appels souverainistes, mais il me semble normal de leur rappeler qu’en agissant ainsi, ils divisent les gens bien davantage qu’ils ne les rassemblent.
Il y a eu une période où on composait avec ces messages sans s’en plaindre. La fièvre «du vouloir un pays» était telle que la perception agissait de manière à éviter de s’y opposer.
Mais il n’y a plus de coup de chaleur assez fort pour que cette pratique continue sans qu’elle soit maintenant remise en question.
Il était peut-être de bon ton de croire que la place était libre pour toutes les exagérations le 24 juin. Mais en 2015, ce n’est plus le cas.
Le message lancé par les nationalistes amoureux fous du Québec, c’est qu’ils veulent aussi prendre leur place et fêter sur la base de ce qui nous rassemble.
Je ne crois pas du tout à l’idée de faire taire ceux qui veulent que le Québec devienne un pays.
Insister pour continuer malgré l’adversité reste possible, mais qu’on ne vienne pas se plaindre si l’envie de fêter dans ces lieux où on dénature ainsi la Fête diminue.
Notre fleurdelisé est le symbole de notre nation et il rassemble tous les Québécois.
Je ne suis pas en train de dire que l’insistance des indépendantistes le 24 juin à vouloir augmenter le volume de leur cabale risque de ternir le drapeau du Québec, mais à force de ne pas comprendre l’appel de la majorité à vouloir fêter tous les Québécois, l’évènement pourrait diviser encore plus qu’il ne le fait déjà.
L’amour des Québécois pour leur nation s’arrête de plus en plus quand on leur fait passer une sorte de nationalisme pour tout le nationalisme.
On peut célébrer sa langue, l’intégrité de son territoire, ses façons de faire et de vivre ensemble, sa culture très particulière et même son modèle économique sans subir l’exaltation répétée que sans un pays rien de tout cela n’est possible.
Les chants patriotiques, le patrimoine et l’histoire du Québec peuvent servir l’épanouissement de tous les Québécois dans l’enthousiasme de nos réussites à l’occasion de la Fête nationale.
Bref, je ne veux pas que la Fête du 24 juin devienne un symbole qui divise.
Si le Mouvement national des Québécoises et Québécois ne voit pas qu’il a déjà franchi la ligne qui le sépare de l’organisation d’une Fête qui rassemble tous les Québécois, il mérite un rappel à l’ordre.
Si son grand frère le Parti québécois ne voit pas qu’il nuit à la Fête quand ce rappel à l’ordre ne vise qu’à soulever le point qu’on souhaite avant tout célébrer qui nous sommes dans ce qui nous rassemble, il mérite les soupçons de vouloir instrumentaliser la Fête nationale.
Le 24 juin ce n’est pas la Fête des indépendantistes du Québec.
C’est la fête de tous les Québécois, ces «8 millions d’étincelles» !
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