Note : Ce billet a d’abord été publié au Journal de Québec et au Journal de Montréal dans la section du blogue des «spin doctors».
On apprend ce matin que le NPD dirigé par Thomas Mulcair «représenterait mieux les valeurs et les revendications de la FTQ» que le Bloc québécois. Le retour de Gilles Duceppe et celui de la défense de l’indépendance du Québec par la formation fédérale, bien appuyé par le chef du PQ Pierre Karl Péladeau ne semble pas avoir convaincu le secrétaire général de la Fédération des travailleurs du Québec. À moins que ce soit justement cet appui de PKP au Bloc qui induise cet effet ?
«Je ne connais pas un seul syndicat de la FTQ – au moment où on se parle – qui donne son appui au Bloc québécois», affirme Serge Cadieux (source).
La journée commence bien mal pour qui croit encore aux chances du Bloc au Québec.
Au micro de Paul Arcand, Gilles Duceppe se défend comme il peut, et même, se montre rassurant.
Il demeure que la question lui sera posée abondamment dans les prochains jours… Si le Bloc n’est même pas capable de convaincre ses alliés naturels de voter pour lui qu’est-ce qui attend ceux qui viennent de plonger comme candidats bloquistes?
Est-on trop dur à l’endroit du chef péquiste en se demandant si son appui à la démarche du Bloc de ramener à l’avant-plan la défense des intérêts d’un Québec souverain dans cette campagne lui portera ombrage au lendemain du 19 octobre?
Chose certaine, pour le moment, le Bloc n’accumule pas les appuis chez les autres partenaires de la souveraineté.
Hier, le député péquiste de Sanguinet a fortement réagi sur sa page Facebook à « l’appui » de Françoise David à Alexandre Boulerice du NPD dans son comté. Son chef ne pourra pas se rendre au 19 octobre sans être questionné sur sa capacité à rassembler les souverainistes derrière les troupes de Gilles Duceppe.
Évidemment, la FTQ a pris fait et cause contre les conservateurs bien avant le lancement officiel de la campagne fédéral et on dira que l’appui au NPD est circonstanciel et qu’il faut relativiser. En sourdine, on dira aussi que Pierre Karl Péladeau n’est pas le mieux placé pour négocier avec les dirigeants syndicaux pour ménager le Bloc dans cette campagne et faire valoir les conséquences qu’un faible résultat aux urnes pourrait avoir sur la suite des évènements pour La Cause, mais bon…
Les péquistes et leur chef auront bientôt une grosse décision à prendre sur leur « engagement terrain » dans cette longue campagne fédérale.
Il n’y a probablement pas de cause à effet entre l’arrivée de PKP à la tête des forces indépendantistes et l’annonce que la FTQ largue le Bloc.
Mais il y aura des conséquences sur son leadership.
L’appui de la FTQ au NPD vient mettre le PQ et son chef sous pression. Ils doivent décider dès maintenant jusqu’où ils sont prêts à se mouiller aux côtés de Gilles Duceppe et vivre avec l’interprétation future des résultats du Bloc quoi qu’il advienne.
Déjà que Mme Marois ait décidé de mettre l’épaule à la roue en choisissant de sortir de sa réserve pour lancer quelques cailloux à Stephen Harper et qu’on a déjà franchi un point de non retour au Bloc sur la question de s’afficher plus indépendantiste que jamais, il sera difficile pour PKP de reculer sur son niveau d’engagement aux côtés de Gilles Duceppe.
On pourra me dire que c’est un raisonnement un peu tordu, mais imaginez un seul instant que le Parti conservateur augmente son nombre de députés au Québec dans ces circonstances et que PKP se présente devant les dirigeants de la FTQ…
La centrale syndicale ayant déjà déclaré la guerre à Stephen Harper en janvier dernier et compromis sérieusement le Bloc avec cet appui au NPD aujourd’hui pourrait faire élire une majorité de députés oranges au Québec, sans nécessairement réussir à chasser Stephen Harper du pouvoir.
Le chef péquiste aurait à ce moment bien plus d’arguments pour retourner la situation à son avantage.
De là à dire que les péquistes ont intérêt à partir de maintenant à ce que plus de conservateurs soient élus au Québec, là où ils ont de réelles chances de l’emporter… je l’écris du bout des doigts, mais avec un petit sourire en coin.
Mise à jour d’après-midi: Invité chez Normandeau-Duhaime (entre 4:00 et 10:30), j’ai résumé l’essentiel de ce billet, mais d’autres informations se sont ajoutées. D’abord, on peut entendre sur le même enregistrement Magalie Picard (vice-présidente exécutive de l’Alliance de la fonction publique du Canada – AFPC) affirmer que «la manchette de La Presse serait fausse» et que la FTQ n’aurait pas vraiment largué le Bloc. Mme Picard a cependant répété qu’un budget de 5 millions de dollars avait été voté par les fonctionnaires fédéraux pour faire campagne contre le gouvernement Harper. On peut d’ailleurs sentir dans un article écrit par Stéphanie Marin de La Presse canadienne et publié au Devoir que le ton a quelque peu changé et que ce qui importe, c’est moins l’appui au NPD que de battre les conservateurs… Pendant ce temps, le chef du NPD a accepté avec bonheur « l’appui » (officiel ou pas?) de la FTQ et Michel Hébert a analysé l’impact de ce «coup de Jarnac inoubliable». Il faudra suivre les journalistes affectés à la couverture sur le terrain des différentes formations politiques engagés dans la campagne pour connaître le fin fond de l’histoire, car le message des centrales syndicales ne semble pas clair, au-delà de ce qui est écrit dans ce communiqué.
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