Note : Ce billet a d’abord été publié au Journal de Québec et au Journal de Montréal dans la section « blogue ».
Je me souviens de l’effervescence à l’école liée à ces moments où des élèves avaient au programme une sortie scolaire. Que ce soit au musée, au théâtre, au Salon du livre ou à l’occasion d’une classe neige/verte, d’un voyage culturel ou sportif, la motivation des élèves à apprendre semblait décupler. Si de nos jours les accès à Internet permettent aux intervenants extérieurs d’entrer dans la classe, il ne faut pas oublier comme c’est précieux de pouvoir profiter d’un «tiers lieu» de médiation culturelle pour apprendre…
Même la visite à la bibliothèque, dans un gymnase ou à l’auditorium est la source d’une belle motivation pour des jeunes trop souvent confinés aux quatre murs de la classe. Les enseignants qui savent varier les contextes et les situations pour favoriser les apprentissages le découvrent rapidement : les enfants sont plus alertes et très vigilants quand on les sort de leur routine !
Il faut reconnaître que la charge de travail d’un enseignant qui multiplie les occasions d’apprendre hors des murs de la classe est plus lourde que celle d’un autre qui se contente de ce dont il dispose dans son local. Pas étonnant dans ces circonstances que la période actuelle soit difficile pour les enseignants autant que pour tous ces milieux qui accueillent normalement les élèves.
Les tensions liées aux négociations pour obtenir de meilleures conditions de travail placent le personnel scolaire devant des dilemmes pas évidents : faire le minimum pour respecter le mot d’ordre syndical ou faire ce qu’il faut pour varier les contextes d’apprentissages. Et je ne parle pas des budgets qui doivent être au rendez-vous pour que les sorties scolaires soient possibles…
On voit passer avec consternation les articles et reportages qui font état de la situation cet automne à différents endroits. Les réservations pour les voyages chutent, le domaine du livre et les intervenants en théâtre s’inquiètent, les musées écopent parce que les écoliers ne sortent plus des classes…
Faut-il blâmer le gouvernement dont les offres sont décriées par les milieux scolaires ou les syndicats qui mettent de la pression sur les enseignants pour qu’ils respectent le mot d’ordre ?
Les enfants et leurs parents ne peuvent pas facilement départager à qui appartient la responsabilité dans ce contexte où l’affrontement agit de manière à ce que tout le monde se renvoie la balle en accusant l’autre de ne pas se montrer responsable.
Résultat : des institutions culturelles qui doivent elles-mêmes composer avec des coupures voient une bonne part de leurs revenus « autonomes » fondre sans qu’elles puissent rien y faire.
D’une certaine manière, on comprend les enseignants, des partenaires sans qui ces sorties ne se feraient pas et d’une autre, on aurait le goût de dénoncer ce recours au boycott cyclique qui les frappe toujours quand les rondes de négociation s’étirent.
Dans ces circonstances, les plus belles politiques culturelles ne servent à rien.
Même les partenariats les plus solides entre l’éducation et la culture ne tiennent plus.
La logique des négociations centralisées des conditions de travail suppose ces dommages collatéraux et on ne peut rien y faire.
Pour que les enfants puissent apprendre de la culture dans les meilleurs conditions possibles, il faut que les planètes des relations de travail soient toutes bien alignées.
Les enfants et les lieux de culture attendront ainsi que les employeurs et les travailleurs en éducation s’entendent.
La culture n’est pas un service essentiel !
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