Note : Ce billet a d’abord été publié au Journal de Québec et au Journal de Montréal dans la section du blogue des «spin doctors».
Le ministère de l’Éducation avait annulé la seule question à développement long de l’examen unique de juin 2016 en histoire nationale sous le prétexte d’un bris de confidentialité. Il vient de faire marche arrière et redonne à tous les élèves « l’ensemble des points associés à la question » qu’ils aient eu ou pas du succès à répondre. Grosso modo, c’est l’équivalent du quart des points que le ministère accorde aux élèves quoi qu’ils aient répondu à l’épreuve de fin d’année en histoire. Ça représente 12,5% de leur année reçu en cadeau…
Il semble bien que ce soit le trop grand nombre d’élèves en situation d’échec qui ait favorisé ce retournement de situation.
On se souviendra que c’est vraisemblablement la forte prévisibilité du ministère dans le choix de sa question à développement long qui est à l’origine du problème.
Un enseignant futé a « deviné » le sujet de la question, il a partagé sa réflexion avec ses élèves dans le contexte d’un séance de travail préparatoire à l’examen et une élève « vedette » des médias sociaux a relayé cette information à grande échelle.
Le Ministère de l’Éducation (MEES) s’en est trouvé complètement dépassé.
L’examen a eu lieu le 15 juin dernier et on avait appris le lendemain que le MEES prenait « la situation très au sérieux » (source).
Tous ceux qui connaissent des enseignants en histoire de 4e secondaire savent que la correction de l’examen sans la réponse à la fameuse question 22 exposait un nombre important d’élèves à un risque d’échec, seules les réponses aux questions à choix multiples ne comptant pour le calcul de la note de l’examen.
Devant le gâchis qui s’annonçait, on a préféré donner 12 points gratis sur 50 aux élèves.
Reste que toute l’opération précipite une remise en question totale de l’approche du ministère en matière d’évaluation des apprentissages.
Plusieurs élèves à la fin de leur secondaire vont à leurs cours pendant une grande période de l’année pour apprendre à composer avec des examens plutôt qu’à réellement s’intéresser aux matières scolaires au programme. C’est devenu un irritant majeur.
En liant la réussite de l’examen unique de fin d’année à la réussite du cours (l’examen compte pour 50% du résultat de l’année), la pression est très forte et le système est actuellement en train de dérailler.
Comme je l’écrivais dans un billet précédent, il est possible pour un ou des États par un examen national unique de mesurer les acquis de formation, mais il faudrait procéder autrement que par l’approche privilégiée par le MEES. Le Programme PISA y parvient avec un certain succès.
On inscrira dans le grand livre d’histoire du Québec qu’il est impossible de savoir si les élèves en 4e secondaire de la cohorte 2015-2016 savent leur histoire nationale, s’ils sont capables de « comprendre le présent à la lumière du passé » et s’ils sont préparés « à participer de façon responsable, en tant que citoyens, à la délibération, aux choix de société et au vivre-ensemble dans une société démocratique, pluraliste et ouverte sur un monde complexe ».
Je ne sais pas si on y a pensé, mais annuler tout simplement l’examen et faire compter l’évaluation des enseignants pour 100% de la note finale (au lieu de 50%) aurait aussi pu être envisagé.
Le communiqué du MEES affirme que « des travaux en vue d’augmenter la sécurité et la confidentialité entourant les épreuves ministérielles » vont être entrepris.
Je ne suis pas rassuré du tout.
C’est toute l’approche en évaluation qui culmine par ce « gâchis national » qui doit être revue !
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