Il a peu été question de l’enseignement de l’histoire pendant la dernière campagne électorale, mais le Devoir avait quand même pu résumer la position de chaque formation politique, quelques jours avant le scrutin. Depuis l’arrivée en fonction du nouveau ministre de l’Éducation, les cours d’histoire font la manchette assez régulièrement. Si l’annonce du report d’un cours obligatoire d’histoire du Québec pour tous les cégépiens semble bien accueillie, la décision de ne pas aller tout de suite de l’avant appuyé par le Rapport Beauchemin déçoit : la réforme de l’histoire au secondaire est retardée pour « prendre le temps de bien faire les choses », affirme le cabinet du ministre Yves Bolduc (source).
Revenons d’abord sur l’enseignement collégial.
Comme l’évoque Pascale Breton de La Presse, le Conseil supérieur de l’Éducation (CSE) a peut-être cloué le cercueil du futur cours d’histoire obligatoire pour tous les cégépiens par la diffusion cette semaine de son avis qui recommande au ministre de ne pas aller de l’avant :
« Le Conseil recommande au ministre de ne pas procéder à la modification réglementaire parce qu’elle aurait pour effet de réduire la zone de choix des étudiantes et des étudiants, d’uniformiser davantage la formation générale et de diminuer l’autonomie des établissements. »
J’étais d’avis que l’introduction d’un tel cours obligatoire était prématurée et, tout comme Caroline Senneville (présidente de la Fédération nationale des enseignantes et des enseignants), je plaidais pour un moratoire, n’étant pas d’accord avec la précipitation dès la prochaine rentrée scolaire. L’idée d’ajouter un cours est excellente, mais il faut préserver la formation complémentaire. Éliane Laberge (la présidente de la Fédération étudiante collégiale du Québec) avait les mots justes pour identifier le dilemme :
« La formation complémentaire est l’une des façons, pour les cégépiens, d’élargir leurs horizons ou d’accéder à un programme universitaire en complétant leur formation. » (source)
Les solutions de rechange du CSE évitent que le cours d’histoire du Québec remplace un cours complémentaire :
« En revanche, le Conseil formule des solutions de rechange à la proposition actuelle, soit d’approfondir les apprentissages sur le Québec contemporain dans la composante spécifique de certains programmes et de développer, à même l’offre de la formation générale complémentaire, des cours sur le Québec contemporain pour que les étudiantes et les étudiants puissent en faire le choix. Il suggère également d’envisager de nouveaux moyens pour que la formation générale puisse évoluer dans les prochaines années sans que cela ne donne lieu à la compression de la formation générale complémentaire, et ce, par-delà les résistances exprimées jusqu’ici. »
Au secondaire
J’aimais bien la vision de Jocelyn Létourneau (titulaire de la Chaire de recherche du Canada en histoire du Québec contemporain) à la suite du Rapport Beauchemin : « Est-ce que les propositions du Comité amèneront une transformation importante de l’enseignement de l’histoire au secondaire ? Sans doute pas. »
Marie Malavoy (précédente ministre) évoquait un « renforcement de l’histoire nationale », en février 2014, au moment d’une annonce. On peut entretenir des réserves sur les velléités péquistes de « souverainiser » l’enseignement de l’histoire, mais la volonté de structurer autour d’une trame chronologique étalée sur deux années pourrait corriger les redondances actuelles et c’est une bonne idée. Sur ce front, le ministre Bolduc aurait avantage à s’inspirer des travaux de Jacques Beauchemin et Nadia Fahmy-Eid, après avoir ajusté, s’il y a lieu, ce qui pourrait être perçu comme une teinte politique partisane, parfois subtile, à un domaine de formation essentiel dans la construction de l’identité des jeunes Québécois.
Néanmoins, il faut bien relativiser : les jeunes semblent avoir une « conscience historique tristounette » (source) et « ce n’est pas parce qu’on change le cours qu’on va modifier les représentations des jeunes » (Jocelyn Létourneau).
Ajout : Point de vue convergent de Antoine Letarte, enseignant au collégial, « Une mesure déraisonnable ».
Idées pour de prochains billets : l’anglais intensif au primaire et les maternelles à temps plein destinées aux enfants de 4 ans en milieu défavorisé !
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