Les écoles privées font partie de la solution

Note : Ce billet a d’abord été publié au Journal de Québec dans la section « blogue ».

L’année scolaire 2014-2015 en est une de rupture pour l’enseignement privé.

Malgré ce qui est véhiculé, le gouvernement se montre très sévère pour l’école privée, cette année.

Selon la Fédération des établissements d’enseignement privés (FEEP), ça fait vingt ans que le gouvernement n’a pas été aussi dur avec les écoles privées…

«Tandis que le budget de l’enseignement privé subissait une coupure de 3%, à laquelle il faut ajouter la coupe du tiers du financement au transport scolaire, celui des commissions scolaires était augmenté de 1,4% et le service de la dette de ces dernières était haussé de 6,9%.» (source, p. 20)

La part exacte du financement public d’un élève au privé
Les détracteurs de l’enseignement privé font valoir que l’État subventionne à grand frais l’école privée. Il faut d’abord savoir que l’État établit un financement de base pour chaque élève qui fréquente une école publique ou une école privée qui dispose d’un agrément avec le MELS. Si ces écoles privées n’existaient pas, chaque enfant «coûterait» à l’État 100% du montant, celui prévu lorsqu’il fréquente une école publique. Lorsqu’un parent choisit une école privée, l’État débourse un montant moindre pour cet élève parce que l’école privée ne reçoit pas le même montant que l’école publique.

De fait, 12% des élèves du préscolaire, primaire et secondaire fréquentent le privé et ce secteur reçoit à peine 4,5% de l’argent public dépensé en éducation pour le préscolaire, le primaire et le secondaire.

Vers la fin des années 90, une certaine polémique existait sur l’écart des montants de base octroyés pour un même enfant au public et au privé. En 1997, un comité chargé de faire la lumière sur ces questions a été formé par Lucien Bouchard et Pauline Marois. Toutes les allocations ont été prises en compte et c’est la proportion de 60% qui a été retenue par la direction générale du financement du MELS pour établir les paramètres de financement depuis ce temps. Ces paramètres ont été admis et respectés, depuis cette période jusqu’à maintenant.

Encore aujourd’hui, les montants de base octroyés aux écoles privées pour un élève sont à 60% de ceux octroyés pour un même élève qui fréquente une école publique. C’est pourquoi la FEEP parle souvent d’une économie de 600 millions de dollars pour l’État.

Un comité d’experts est venu troubler ces chiffres pourtant reconnus par tous en alléguant que le pourcentage effectif du financement actuel des établissements privés agréés était plutôt de 63,6% au préscolaire, 63,9% au primaire et 74,8% au secondaire (source).

Contrairement au comité de 1997, le groupe «d’experts» n’a pas utilisé une méthodologie qui considérait l’ensemble des allocations. On peut donner l’exemple du programme «L’école 2.0» (budget de 240 M$ sur cinq ans) qui donne des fonds aux écoles publiques, mais exclut toutes les écoles privées. Si on avait comparé des comparables, on serait arrivé sensiblement aux mêmes résultats, voire, le chiffre serait peut-être plus proche de 55%. D’ailleurs, fait étrange, «le comité d’experts n’a consulté aucun groupe ni expert provenant du milieu de l’enseignement privé» pour arriver à ses chiffres…

Alors professeur à l’École nationale d’administration publique, Richard Marceau avait expédié à Pauline Marois une lettre, en 1997, qu’il serait bon de relire pour remettre en perspective ce dont il faut tenir compte quand on veut comparer les sommes octroyées par l’État aux élèves qui fréquentent un et l’autre réseau. Les chiffres du Rapport du comité d’experts me paraissent avoir semé plus de confusion qu’autre chose dans le débat.

Les coûts de transport des élèves au privé en forte hausse
Les effets de la diminution de l’aide au transport scolaire des élèves qui fréquentent des établissements privés sont que la facture est transférée aux parents. Il faut savoir qu’une augmentation de 1 000$ des coûts de transport d’un élève risque d’avoir comme conséquence une certaine migration d’élèves du privé vers le public. La FEEP estime dans son mémoire présenté à la Commission de révision permanente des programmes à environ 28 000 élèves ce transfert potentiel. Au terme des trois prochaines années où l’État promet de ne plus soutenir le transport des élèves au privé, si une telle baisse d’élèves devait se matérialiser, l’État s’exposerait à une augmentation de ses dépenses de l’ordre de 100 M$ par année. Drôle de calcul que celui de couper 20 M$ en transport scolaire pour s’exposer à devoir réinvestir 100 M$ au bout de la ligne…

Quand on fait une lecture très attentive du mémoire de la FEEP, on voit que le MELS laisse beaucoup d’argent sur la table des commissions scolaires dans le transport scolaire. Je m’explique…

Déjà cette année, en raison des coupures, des parents d’élèves du privé ont été contraints à abandonner le service de transport devenu trop cher pour leurs moyens. Comme les paramètres de calcul du ministère font en sorte que c’est le nombre d’élèves transportés et facturés en 2004-2005 qui sert de repère, on imagine facilement que la facture défrayée sera beaucoup plus élevée pour le ministère que celle qu’elle aurait dû payer aux commissions scolaires si on se basait sur le nombre réel d’élèves transportés. D’ailleurs, au-delà de la baisse du nombre d’élèves du privé transportés, je serais curieux de savoir combien l’État épargnerait s’il se basait sur des chiffres de 2014-2015, d’autant qu’il semble y avoir eu diminution d’élèves dans les commissions scolaires depuis 2004-2005…

Le financement d’élèves en difficulté
Les élèves en difficulté ont beaucoup de besoins en matière d’encadrement et il est curieux qu’on ne favorise pas plus leur prise en charge par les écoles privées puisque l’encadrement est justement une des forces reconnues des écoles privées. Si le financement des élèves en difficultés qui fréquentent le privé devient lui également équivalent à 60% de celui d’un élève du même type, au public… je suis assez convaincu que la société y gagnera au change.

Le privé est prêt à rehausser l’accueil des élèves en difficultés, lui qui possède déjà une bonne expertise en ce sens par son réseau des résidences scolaires et des écoles en adaptation scolaire.

La main d’oeuvre nécessaire pour servir les 191 établissements autonomes de la FEEP qui regroupe 110 000 élèves est de 25 personnes.

Une diminution du financement aux élèves qui fréquentent une école privée entraîne automatiquement une augmentation des dépenses publiques en éducation.

Les écoles privées peuvent et doivent accueillir leur part d’élèves en difficulté. Pourquoi ne pas les financer à la même hauteur que les autres élèves pour le faire ?

Demande-t-on aux écoles publiques à projet particulier de se soumettre à la même obligation ? Ce serait peut-être aussi une bonne mesure…

Je soumets respectueusement les idées contenus dans ce billet au débat public.

Je souhaite aussi avertir le lecteur (déclaration d’intérêt) que j’ai déjà été directeur d’écoles privées agréées pendant longtemps, même si depuis 2005, je n’ai plus de lien avec l’enseignement privé.

Je crois fermement que les écoles privées ne font pas partie des problèmes de notre réseau d’éducation, mais plutôt, des solutions !

Tags:
0 Commentaires

Laisser une réponse

Contactez-moi

Je tenterai de vous répondre le plus rapidement possible...

En cours d’envoi

Si les propos, opinions et prises de position de ce site peuvent coïncider avec ce que privilégie le parti pour lequel je milite, je certifie en être le seul éditeur. - ©2022 Thème KLEO

Vous connecter avec vos identifiants

ou    

Vous avez oublié vos informations ?

Create Account

Aller à la barre d’outils