Note : Ce billet a d’abord été publié au Journal de Québec et au Journal de Montréal dans la section « blogue ».
Ce qui m’a le plus dérangé dans les déclarations du restaurateur Beppino Boezio, propriétaire de la Crémaillère depuis 1971 est cette idée qu’étouffés par les taxes ou par la bureaucratie à Québec, il vaudrait mieux se taire pour ne pas « être identifiés ».
Un porte-parole du cabinet du maire Labeaume a répondu dans un article subséquent qu’il « ne sait pas pourquoi tu es obligé de te cacher pour dénoncer une situation comme celle-là », mais on ne peut pas enterrer le malaise avec cette seule déclaration.
S’il existe véritablement une certaine loi du silence à la Ville de Québec, il faudra s’employer à la dénoncer.
Pour le chroniqueur que je suis, ça donne drôlement le goût de laisser sortir le côté givré…
Il me faut écrire d’entrée de jeu que j’ai souvent entendu des gens influents à Québec me dire qu’on ne pouvait pas se permettre de se mettre à dos le maire Labeaume si on voulait que nos affaires marchent bien.
Ça m’a toujours paru un peu cliché comme affirmation.
À quelles représailles pourrait-on s’attendre à critiquer le travail du maire au point de se mettre Régis Labeaume à dos ?
Si on est une station de radio parlée, j’imagine que ça peut vouloir dire de ne plus être en mesure de recevoir monsieur le maire en entrevue.
Pour quelqu’un qui fait de la politique, c’est s’exposer à lire dans les médias une déclaration choc de Régis Labeaume. Parlez-en à Gérard Deltell… Même s’il y a eu réconciliation depuis ce temps, le « il ne fait plus partie de l’équation » m’avait paru tellement ingrat et injustifié à son endroit.
Mais quand on fait des affaires à Québec, quand on est restaurateur, à quoi on s’expose exactement si on se laisse aller à exprimer son ras-le-bol de l’administration Labeaume ?
Faudrait savoir, il me semble…
Est-ce que le « pouvoir du maire » dans la Ville va jusqu’à jouer sur le chiffre d’affaires des restaurateurs ?
Est-ce que les gros événements à Québec peuvent changer d’endroits au rythme des bonnes ou mauvaises critiques sur le travail de Régis Labeaume ?
Beppino Boezio n’était pas le seul à exprimer des réticences à parler, d’autres ont aussi souhaité ne pas être identifiés. « Moins on parle, mieux c’est », constitue un extrait mot pour mot d’une déclaration de M. Boezio, rapportée par Jean-François Racine du Journal.
À Québec généralement, à part les syndicats, l’opposition et quelques chroniqueurs ou animateurs, ce sont toujours les mêmes qui vocifèrent contre les politiques de la Ville.
Vrai que dans l’équipe Labeaume il y a des gens de qualité qu’on n’entend pas souvent depuis qu’ils ont été élus, mais je ne peux pas croire qu’ils ne s’échangent pas quelques points de vue divergents de temps à autres dans les officines de l’hôtel de ville.
La critique du travail de Régis Labeaume ou celui de Louis Côté (son chef de cabinet) doit être la norme, pas l’exception.
Comme je n’ai moi-même jamais rien vécu de négatif suite à une critique, je vais me garder une petite gêne avant d’affirmer quoi que ce soit, mais j’accorde une certaine crédibilité aux propos des restaurateurs, sur le fond et sur la forme.
Cette impression qu’on ne pourrait pas critiquer à visage découvert l’administration Labeaume sans avoir à subir des représailles est déjà très mauvaise pour Québec.
Si cette impression est basée sur des faits réels, j’espère que les histoires sortiront publiques et on pourra mieux juger.
Je ne peux absolument pas adhérer au principe qu’en se taisant pour dénoncer les abus de notre administration municipale à Québec, les citoyens en sortiraient gagnants !
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