Note : Ce billet a d’abord été publié au Journal de Québec et au Journal de Montréal dans la section du blogue des «spin doctors».
À l’approche de la Journée internationale des femmes du 8 mars prochain, on s’escrime de toutes parts sur le degré d’appartenance et d’identification au mouvement féministe. Jamais le slogan du Collectif 8 mars n’aura été si bien suivi: « Appel à toutes pour se faire entendre ! »
Depuis que la ministre de la Condition féminine Lise Thériault a refusé le 29 février dernier de « porter l’étiquette » du féminisme dans un article de La Presse canadienne publié au Devoir, de nombreuses femmes et quelques hommes sont sortis publiquement pour exprimer leur point de vue sur cette question.
La ministre de la Justice a senti le lendemain le besoin « de militer pour l’égalité hommes-femmes sans avoir à porter l’étiquette de féministe » (source) en solidarité avec celle qui est également vice-première ministre du gouvernement.
Depuis, le sujet est devenu presque viral.
Le premier ministre a été obligé de se prononcer en évitant de se trouver en porte-à-faux avec les positions de ses deux ministres, mais Lise Thériault elle-même a depuis, reculé de quelques pas: finalement elle est féministe, mais « à sa manière ».
Jamais facile au gouvernement ce genre de situation. Le 8 mars approche et on peut probablement dire que le mal est fait. Il s’en trouvera plusieurs pour alléguer que celles qui disposent de postes de commande au gouvernement ne portent pas bien haut le flambeau du féminisme et de la cause des femmes.
Je ne me souviens pas d’une telle situation dans les dernières années.
Je ne vois pas l’intérêt des deux femmes ministres d’avoir pris leur distance de la cause de nombreuses femmes qui, à ce moment-ci, monte en puissance à l’occasion de la journée sensée « fêter les victoires et les acquis, faire entendre leurs revendications, afin d’améliorer la situation des femmes ».
C’est comme si mesdames Thériault et Vallée n’avaient pas vu venir le 8 mars.
S’employer à réduire la portée et l’identification au mouvement féministe mène inévitablement à des levées de bouclier. En s’affichant pour « beaucoup plus égalitaire que féministe » Lise Thériault risque de perdre sur tous les fronts.
En peinturant ainsi les féministes dans le camp de celles qui luttent contre les hommes, elle n’aide en rien la cause du gouvernement ou celles des femmes, même si c’est pour s’affirmer en championne de l’égalité hommes-femmes.
On peut difficilement remettre le dentifrice dans le tube maintenant qu’il est sorti, d’autant que de nombreuses personnalités ont renchérit en rapportant leur propre perception suite à ces déclarations.
Voici maintenant que Nathalie Petrowski s’emploie à dénigrer le point de vue de Marie-France Bazzo qui elle aussi souhaite se méfier « des idéologies, même les plus séduisantes ». L’allusion de la chroniqueuse de La Presse en fin de texte à Donald Trump n’augure rien de très positif pour la suite des débats, d’ici à mardi prochain…
Il me semble que nous aurions tous intérêt à se percevoir féministes pour ne pas prêter flanc à vouloir maintenir les nombreux privilèges dont les hommes ont bénéficié à travers le temps.
J’en suis, même si je suis absolument confortable avec la posture de Mme Bazzo exprimée dans son éditorial.
Il y a encore plusieurs domaines où l’égalité entre les hommes et les femmes n’est pas atteinte. Il y a donc lieu de célébrer ensemble le 8 mars et de ne pas se dissocier de l’appartenance au mouvement féministe, ne serait-ce que pour le motif de ne pas laisser seules entre elles, celles qui y trouvent un moyen de combattre les hommes.
On peut donc parler d’un point de vue de l’analyse politique d’un faux pas de deux ministres qui ont manqué de sensibilité à la cause qui devrait être la leur.
Souhaitons qu’elles aient laissé beaucoup d’espace dans leur agenda du 8 mars « pour se faire entendre », en toute solidarité avec les hommes et les femmes qui croient en l’utilité d’une Journée internationale des femmes.
Mise à jour du 7 mars: Billet coup de poing de Lise Ravary et précisions de Aurélie Lanctôt suite au passage de Sophie Durocher / Geneviève St-Germain à l’émission Tout le monde en parle.
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