Note : Ce billet a d’abord été publié au Journal de Québec et au Journal de Montréal dans la section blogue.
On ne connait pas la puissance de tout ce qu’on met dans la tête des enfants quand ils sont petits…
Mes trois garçons le savent, il y a quelques incontournables dans mes passions musicales qui feraient que je me déplacerais n’importe quand pour aller assister à leurs concerts. Peter Gabriel en fait partie.
C’est avec un grand plaisir que j’ai donc accueilli la nouvelle que mon fils cadet nous accompagnerait ma conjointe et moi sur les plaines pour l’ouverture du Festival d’été de Québec.
Je le soupçonnais d’agir avec moi comme j’ai agi avec sa mère voilà quelques jours à l’occasion de la prestation de Grease : je suis allé voir ma blonde voir Grease !
Et j’ai beaucoup apprécié ma soirée…
Mon fils a 21 ans et il est un habitué du FEQ. On ne fait pas souvent les mêmes choix et quand ça arrive, on n’est jamais collé l’un à l’autre.
En jouant un peu du coude dans la foule pour trouver le « bon spot », on a croisé la mère d’un de ses copains chez qui il découche quand le party de gang s’étire un peu tard dans la nuit, de temps à autre. « Bien oui, j’aime Peter Gabriel et je connais quelques tounes de Sting, mais j’avais le goût de sortir avec mes vieux et d’être avec eux autres, ce soir » lui a-t-il expliquée pour justifier sa présence dans la faufilade, collé à ses parents.
Rien d’offensant, l’important restait qu’il avait choisi de manière libre et responsable de passer la soirée avec nous.
Et quelle soirée c’était !
Je ne vous ferai pas de compte-rendu, d’autres l’ont fait bien mieux que je ne saurais le faire (1, 2, 3, 4). Difficile de mieux ouvrir le festival que Gabriel et Sting l’ont fait hier soir…
J’ai parlé avant le spectacle du lien privilégié de Peter Gabriel avec Québec et Sting n’a pas été en reste. Très en voix, la présence sur scène très efficace des deux complices et l’incroyable énergie du groupe de musiciens qui les entourent ont fait oublier les problèmes de son et les moments où quelques spectateurs près de nous avaient l’air de se foutent complètement de ce qui se passait sur scène.
C’est d’ailleurs un des commentaires de mon fils qui m’a le plus frappé. Toujours plus près de la scène que je ne le suis, il me racontait être très surpris du manque d’écoute de certains. « Ils n’ont pas l’air de réaliser qu’ils ne sont pas dans le show et qu’ils nuisent à l’ambiance. Avec ma gang, ça chante, ça danse tout autour de nous et jamais je ne m’aperçois que des spectateurs décrochent à ce point de ce qui se passe en avant. C’est toujours comme ça dans les spot que tu choisis ? »
À l’écouter, les jeunes qui se rendent en gang à un concert viennent « tripper » et ajoutent à l’ambiance, ils ne passent pas leur temps à jaser entre eux de d’autres sujets aucunement en rapport avec le concert.
Je lui ai conseillé de ne pas bouder son plaisir et de garder le focus sur Gabriel et Sting. On n’en a pas reparlé par après…
À plusieurs reprises en début de pièce, je prenais plaisir à l’entendre me dire « je la reconnais celle-là » et même à chanter avec nous. Il est vrai que depuis sa tendre enfance, les harmonies de Gabriel et de Sting jouent souvent dans la maison. À mi spectacle ou à peu près, il s’est même permis deux critiques et quelques souhaits. « Me semble qu’ils ne mettent pas assez en valeur Tony Levin. Wow, cette fille a vraiment une belle voix (en parlant de Jennie Abrahamson dans Don’t Give Up). Penses-tu qu’ils vont jouer In Your Eyes, Sledgehammer et Roxanne ? »
Le grand mosus savait probablement que sa mère et moi apprécions particulièrement le bassiste de Gabriel et de bien d’autres. Lui avions-nous transférés sans s’en rendre compte cette vénération pour la bibitte musicale qu’est Tony Levin ? Il semble bien que oui, si je me fie à sa réaction à toutes les fois où il était mis en vedette dans la deuxième moitié du spectacle. Et je ne vous parle pas des cris d’approbation lors du fameux moment où le micro se rend sous le nez de Levin dans In Your Eyes…
J’avoue avoir beaucoup apprécié sa compagnie avec nous, sur les plaines.
D’un naturel agréable à côtoyer, mon plus jeune fait sa vie à 21 ans et je ne suis pas pressé qu’il quitte le domicile familial comme ses grands frères l’ont fait pendant leurs études universitaires. Je sais que ça va venir, que c’est normal et que c’est bien mieux comme ça, mais bon…
Du début à la fin de notre soirée, il a animé les moments forts de notre première 2016 au FEQ, déjà bien encadrée par l’excellent spectacle des deux légendes. Lors du fameux In Your Eyes, j’en revenais pas qu’il prédise avant le solo de la choriste Jennie Abrahamson, « c’est sûrement la fille de Don’t Give Up qui va remplacer Sevara, tu vas voir ».
Il connaît tellement bien la toune qu’il avait en tête le solo et l’invitée sur le disque live que je fais jouer trop souvent à la maison qu’il est capable de nommer la choriste de Gabriel sur cet album par son petit nom…
En retournant à notre véhicule après le concert, on a beaucoup discuté sur ce qu’on a aimé et on ne s’est pas gêné pour lui avouer notre grande fierté de parents d’avoir partagé ce moment d’intimité musicale avec lui.
Il nous a raconté comme il le fait parfois des petits bouts de ce qu’il a appris dans son nouvel emploi d’été de guide à Parc Canada. En déambulant dans la foule dans le Vieux Québec, c’était un peu inévitable qu’il nous raconte ce qu’il dit aux touristes dans les visites qu’il anime devant certains sites historiques.
Au coin d’une rue en attendant le feu vert, il était en train de nous parler de Chaussegros de Léry quand l’homme du petit couple qui nous précédait sur le trottoir s’est retourné vers nous en disant « Qui peut bien être ce jeune homme qui parle fort de Chaussegros de Léry en pleine rue à minuit ?
C’était un des patrons de mon jeune adulte de fils. On a bien rigolé…
Aujourd’hui, quand je repense à la soirée magique d’hier, je retiens qu’on ne sait réellement pas jusqu’à quel point on influence le futur de nos enfants.
C’est pour des soirées comme celle d’hier que j’aime particulière le FEQ.
La magie sur scène est souvent amplifiée par le bonheur d’être ensemble, simplement, pour vivre intensément ce qu’on a appris à aimer, avec le temps.
On n’a pas découvert hier soir notre plaisir d’écouter Sting et Gabriel. On savait déjà qu’on était pour passer une très belle soirée avec eux.
Mais ce qu’on a découvert un peu plus encore, c’est à quel point notre fils pouvait encore tripper avec nous autres, « ses vieux ».
Merci Peter Gabriel, Sting et le Festival d’été de Québec.
Mise à jour du 9 juillet: Pour voir des images très particulières du concert vu de la scène, il faut lire ce billet de Tony Levin, « Quebec show ».
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