Note : Ce billet a d’abord été publié au Journal de Québec et au Journal de Montréal dans la section du blogue des «spin doctors».
Le 13 octobre prochain, Bernard Drainville pourra dire qu’il a quitté le Parti québécois depuis quatre mois. Il est rendu ailleurs, c’est le moins qu’on puisse dire. Maintenant devenu commentateur politique, il s’emploie à prendre ses distances de son ex formation politique. Je dirais même qu’il prend un certain plaisir à insister sur ce qui divise ses anciens collègues, affaiblissant ainsi leur formation politique.
Le passage entre sa vie de journaliste à Radio-Canada et sa venue au Parti québécois avait beaucoup fait jaser. L’entrevue accordée en février 2007 par André Boisclair quelques jours avant l’annonce de sa décision avait même suscité une plainte à l’ombudsman de la société d’État.
Pendant toute la durée de son appartenance au PQ, Bernard Drainville a souvent été à l’avant-plan. Son parcours en politique active est loin d’avoir été banal.
Son retour au monde des communications s’est avéré tout aussi percutant. Il anime en ce moment une émission quotidienne bien en vue à la radio sur l’heure du midi (déclaration d’intérêt: je chronique à l’antenne d’une autre station dans le même marché que celui où travaille Bernard Drainville) et il intervient une trentaine de minutes à tous les jours de la semaine à la télé, en après-midi.
Il a rapidement trouvé un nouvel équilibre professionnel qui lui assure des tribunes importantes pour continuer de passer des messages politiques.
Je n’ai pas été étonné en début d’août 2016 qu’il se départisse de sa carte de membre du Parti québécois. C’était la chose à faire dans sa position…
Ce qui m’étonne davantage est du côté d’une sorte de ressentiment envers le PQ qui s’exprime à l’occasion par des critiques virulentes de ses ex collègues.
C’est un privilège auquel il a parfaitement droit, évidemment.
Je prends pour exemple cette fois où le 1er septembre Bernard Drainville a sorti de nulle part un pointage interne en provenance de l’équipe de Véronique Hivon qui plaçait au coude à coude Alexandre Cloutier et Jean-François Lisée dans la course à la chefferie, chiffres démentis par l’entourage de Mme Hivon (source).
On ne parle pas de critiques très négatives cette fois, mais il faut se souvenir que cette intervention constituait la première « information » rendue publique qui était de nature à déstabiliser le camp Cloutier.
Chaque fois qu’il est question du Parti québécois, on sent non seulement que les ponts s’effritent assez rondement entre Bernard Drainville et son ancienne formation, mais plus encore, l’insistance à prédire que les lendemains de la course à la chefferie seront difficiles laisse à penser qu’il s’agit d’un voeux personnel, bien davantage que d’une analyse neutre.
L’épisode du 30 septembre de Deux hommes en or me semble avoir constitué une sorte de jalon dans la rupture entre Bernard Drainville et le PQ. En affirmant que « le seul parti en mesure de défaire le Parti libéral de Philippe Couillard en 2018, ce sera la Coalition Avenir Québec de François Legault », il consacre le divorce. Michel Hébert a parlé quant à lui de « Poignards péquistes ».
Aujourd’hui, l’ex député de Marie-Victorin en rajoute une couche en propageant une rumeur à l’effet que Alexandre Cloutier « ne se gêne pas dans les corridors de l’Assemblée nationale pour dire qu’il pourrait bien redevenir avocat » (source).
Le message est redondant et il est de plus en plus clair : rien ne va plus au Parti québécois!
Attention, je n’attribue pas d’intention à Bernard Drainville. Je n’écris pas qu’il fait exprès pour prédire des jours sombres à son ancienne formation politique.
Je constate simplement qu’il arrive souvent que Bernard Drainville juge sévèrement son ancien parti et que le changement de cap est brusque.
Il est bien possible qu’il ait raison sur les fortes turbulences qui existent à l’intérieur du Parti québécois, mais il demeure étonnant qu’une personne qui a passé près de dix ans à vouloir réussir l’indépendance du Québec dans un véhicule, donne si souvent des coups de hache dans la chaloupe.
Encore ici, je veux me montrer prudent. Je n’écris pas que Bernard Drainville veut couler le PQ.
J’exprime seulement que s’il voulait passer le message « après moi le déluge », il n’agirait pas autrement.
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