Guy Vézina est venu faire son tour ici à quelques reprises pour mon plus grand bonheur. Il annonçait récemment le début d’une nouvelle aventure après plus de quarante-cinq ans en tant que professionnel en éducation. Je voulais depuis un bout de temps lui rendre hommage… Je profite du fait qu’il est à la retraite depuis une semaine pour m’exécuter ce soir, voulant surtout laisser dans ce lieu qui témoigne de mes apprentissages, la trace d’un des premiers hommes qui m’a donné confiance sur le plan professionnel!
Éducateur physique, animateur de radio et épicurien devant l’éternel, Guy est un des personnages les plus colorés à avoir traversé ma vingtaine. À mon arrivée au Collège du Mont-Sainte-Anne en 1983, Monsieur Vézina en menait déjà très large aux sports Étudiants dans le Québec tout entiers. Je me souviens de son grand bureau où l’action ne manquait pas, les jeunes entrant et sortant pour connaître leur rôle dans la grande toile sportive intra-muros que Guy avait tissée. C’est l’un des premiers à m’avoir demandé d’écrire. C’était en mars 1984 pour une édition régionale de Franc-jeu que j’ai encore dans mes archives. Mon texte s’intitulait «Un sens à la victoire»… En éditorial de ce #3 du volume VII, Guy écrivait:
«Les valeurs en l’an 2009 (dans 25 ans) changeront sans doute, sauf que celles auxquelles nous adhérons aujourd’hui doivent s’intégrer dans notre notre vie; tous, nous devons nous engager à faire quelque chose pour les autres et, comme le disait le fondateur du scoutisme, « tâcher de rendre cette terre meilleure que nous l’avons trouvée »».
À cette époque du milieu des années 80, je me souviens des repas que nous prenions au restaurant «La Lasagna» où nous étions plusieurs à refaire le monde le vendredi soir. Parfois, l’énergie se transportait chez Guy au Lac-Brompton où notre hôte nous racontait ses hésitations de jeunesse entre la vie de moine qu’il n’a probablement considérée que quelques secondes ou celle qu’il avait choisie, à cent milles à l’heure. Car il faut le dire, notre patriarche était souvent animé par des idées de grandeur. Il voyait loin, très loin. C’est ce que j’aimais le plus chez lui. Il ne pensait pas qu’au gymnase ou à l’Aréna du Mont-Sainte-Anne; il avait toute la jeunesse du Québec en tête. Mes premières années de coaching au hockey scolaire et au basket avaient été sous sa gouverne et Guy ne ratait aucune occasion de nous enseigner la grandeur de notre mission d’éducateur, dans la victoire comme dans la défaite.
Et puis, je l’ai perdu de vu, quelque peu aux abords des années 90, changement d’école de ma part oblige. J’ai bien vu qu’il avait continué son inlassable travail à l’Association Régionale du Sport étudiant des Cantons de l’Est, au Conseil Sport Loisir de l’Estrie et à plein d’autres endroits où il vantait les vertus de l’activité physique pour élever l’être humain.
C’est sûrement pour sa persévérance et sa foi ardente dans la possibilité d’éduquer par les sports que le MELS lui a décerné en octobre 2007 «le Prix du bénévolat en loisir et en sport Dollard-Morin». Un extrait du texte lui rendant hommage:
«Reconnu partout au Québec comme le défenseur des valeurs du sport en milieu scolaire, il est souvent invité comme conférencier à des colloques et congrès. Mais c’est aussi un homme « de terrain », puisqu’il a été annonceur à des compétitions d’athlétisme locales, régionales, provinciales et nationales pendant 25 ans.»
Guy est un conteur fascinant, allant d’une anecdote à l’autre avec le rire communicatif et le vocabulaire opulent. Car il faut le dire, notre bon vivant est un érudit citoyen qui n’a jamais caché son amour des lettres et de la discussion de haute voltige intellectuelle. Chacune de nos conversations avait le don de ne pas être banale. Voilà pourquoi je suis toujours ému de sa visite sur ce carnet qui lui a permis de me retrouver voilà quelques mois, ajoutant l’honneur de sa conversation ici aux quelques courriels d’encouragement qui continuent de trahir l’éducateur, toujours muni du bon geste pour valoriser les autres…
Sans surprise, j’apprenais récemment que la Fédération québécoise du sport étudiant a remis à ce bon vieux Guy, le prix spécial du conseil d’administration au moment du 25e Gala d’excellence du sport étudiant présenté à Saint-Hyacinthe. Bizarrement, je sais que tous ces honneurs ne l’ont pas encore convaincu de la grandeur de son oeuvre, car tout comme beaucoup de grands québécois de son temps, il demeure toujours persuadé de n’avoir fait que son travail.
On comprendra alors que j’ai voulu ajouter ma voix à toutes celles qui le remercient d’avoir laissé une trace indélébile dans nos vies. L’éducateur qu’a été Guy Vézina peut continuer de regarder vers l’avant comme il l’a toujours fait, mais au hasard d’un petit regard furtif dans le rétroviseur, il pourra apercevoir plusieurs générations de personnes, le pouce vers le haut, l’air de dire, «merci coach, tu peux apprécier le bon travail que tu as fait pour chacun de nous»!
Le précurseur a ouvert la voie. À nous, de prendre le relais pendant qu’il peut encore nous baliser le chemin, à l’occasion d’un moment où ses nouveaux projets lui en offriront la possibilité.
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Cher ami Mario,
Je prends connaissance à l’instant de ce bel hommage que tu prends le temps de me rendre malgré toutes tes responsabilités actuelles; les mots me manquent pour te dire à quel point je suis touché au plus profond de mon coeur; en te lisant, les souvenirs de cette époque où nous nous sommes connus me font réaliser à quel point nous ignorons l’influence que nos actions ou nos propos ont pu susciter chez d’autres durant notre parcours terrestre.
Merci beaucoup!