J’apprenais dimanche par l’entremise d’un article du Journal de Québec l’existence d’une campagne de la Fédération autonome de l’enseignement (FAE) qui vise «à montrer que trop d’élèves en difficulté sont intégrés dans les classes ordinaires». Cette «Opération composition de la classe» se tient du 16 au 31 octobre 2017 et exige du personnel enseignant syndiqué du préscolaire, du primaire et du secondaire le remplissage d’un formulaire en ligne qui pose plusieurs questions…
Pas étonnant que des parents s’insurgent et dénoncent le « profilage de handicap » que cette opération révèle. On peut être d’accord avec le fait que plusieurs classes dans des écoles publiques ne soient plus vraiment « régulières », mais procéder de cette façon pour faire valoir un point pose d’énorme difficultés quant au respect élémentaire de la protection des renseignements personnels. J’ai bien noté un certain nombre de mesures pour éviter que «les jeunes soient identifiables», mais je me place dans la posture des parents et je comprends facilement leur indignation.
Pour ajouter au désarroi, l’ancien syndicaliste et blogueur au Journal Réjean Parent met en opposition les parents et le syndicat dans un billet sans équivoque, «Intérêts communs en collision». Le blogueur semble cautionner le demande syndicale à leurs membres et blâme à demi-mots la réaction des comités de parents, qui veulent «représenter les usagers et [de] refléter leurs attentes».
Je comprends qu’il soit difficile de statuer si l’Opération composition de la classe est légale ou pas, mais il est curieux que le syndicat n’ait consulté qui que ce soit avant d’aller de l’avant. Au moins, M. Parent mentionne cette incongruité.
N’empêche… la fin justifie-t-elle les moyens ?
La poursuite d’un objectif louable perdra-t-il en valeur si les moyens pris pour prouver son point sont entachés d’irrégularités, d’autant que ceux qui normalement pourrait bénéficier des mesures compensatoires sont ceux qui se plaignent des vices de procédure ?
Comment le syndicat peut-il prétendre faire avancer une cause quand il s’isole avec une manière de faire aussi douteuse ?
Il semble que des commissions scolaires aient demandé aux enseignants de ne pas participer, mais sur la page Facebook du syndicat, on peut voir et entendre le message du président de la FAE, Sylvain Mallette.
Quand on constate qu’une des branches régionales du syndicat FAE ne donne pas la même consigne que le président national, il y a lieu de commencer à croire que la communication n’est pas adéquate.
Aussi, le fait que des «commentaires sur l’élève à risque» sont demandés aux enseignants syndiqués ne permet-il pas d’identifier l’élève en question ?
Je suis d’avis que le fin mot de l’Opération composition de la classe n’a pas encore été entendu puisqu’au moment d’écrire ce billet, la page Web de l’initiative laisse voir un message dubitatif:
À suivre…
Mise à jour du lendemain: Au Devoir, «Un sondage syndical controversé sur les élèves en difficulté mis en veilleuse». Au Journal de Québec, «Le sondage controversé est suspendu». De son côté, la Fédération des comités de parents du Québec (FCPQ) reste très inquiète. Dans ce contexte «trouble», le Conseil supérieur de l’éducation (CSE) annonce aujourd’hui la publication d’un avis, «Pour une école riche de tous ses élèves» dans lequel on affirme que «le modèle actuel a atteint ses limites en matière d’inclusion» (source). Plus de détails sur le site du CSE et dans cet autre article de La Presse.
Mise à jour du 25 octobre: Suspension de l’opération «Composition de la classe», il semble qu’une entente entre les parties syndicale et patronale soit intervenue. Quelques détails supplémentaires sur ICI Radio-Canada.
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