Il s’agit du projet d’un enseignant. Depuis deux ou trois ans, il interroge des gens, il lit beaucoup et surtout, il chemine dans le réseau de l’éducation. Son idée a commencé à germer au temps où il étudiait à l’université si j’ai bien compris. Fin octobre/début novembre, il donne le grand coup: la diffusion du premier d’une quinzaine de webisodes, au rythme prévu d’un par semaine! Il dispose d’un site Web, d’une page Facebook et d’un canal sur Twitter et sur YouTube. Déjà, certains blogues font écho à son initiative (1, 2). Il souhaite garder l’anonymat pour le moment, mais il promet de se dévoiler au moment de la diffusion de son premier opus…
La première moitié des webisodes risque d’être liée à une opération de déconstruction. Comment en sommes-nous arrivés à la déséducation? Voyons ce que Jean Bédard pense du concept:
«Telle est l’essence de la déséducation, elle obstrue l’accès direct à ce que les sens drainent d’informations (le sens intérieur autant que les sens extérieurs). La «déséducation» est le contraire de l’observation directe qui produit normalement l’étonnement, l’émerveillement ou l’effroi devant la démesure. Avant d’être mesuré par la raison, l’univers apparaît démesuré (que ce soit l’univers intérieur ou l’univers extérieur) de sorte que l’état naturel de l’intellect consiste en cet effroi que les anciens appelaient «crainte de Dieu» (et qui n’a rien à voir avec la peur d’un juge, mais avec le sentiment de petites se devant la démesure du réel). Avec l’expérience directe de soi et de la nature peut s’installer ou se réinstaller la confiance naturelle de l’enfant. C’est à ce moment-là que la «crainte de Dieu» devient émerveillement. Mais nous n’en sommes pas là.»
Ce n’est pas le premier billet que je publie qui critique sévèrement notre façon de faire l’école. Récemment, j’ai hyperlié vers la vidéo de Erica Goldson (Valedictorian) (La meilleure élève dénonce l’enseignement scolaire dans son discours de remise des diplômes) et vers celle qui provoque énormément aux États-Unis actuellement («Waiting for Superman»). On me dirigeait en fin de semaine vers un mouvement d’artistes qui veulent réformer l’école aux États-Unis et il me semble que dans tous les recoins du Web actuellement, les initiatives pleuvent dans le même sens!
Avec «La Déséducation», on parle ici d’un prof qui a pris de son propre argent pour initier une réflexion. Un prof qui prend la parole au lieu de militer dans son syndicat ou de travailler en fonction d’une promotion pour se donner plus de pouvoir pour changer les choses… il me semble que ça mérite d’être encouragé. Mais il me prévient au bout du fil (on ne se connaît que depuis cette conversation): «je ne serai pas tendre non plus envers les directions d’école!» J’espère bien… La déséducation est un sujet bien trop sérieux pour «épargner» qui que ce soit. Autre citation sur ce phénomène, en provenance du site «PRomotion des Initiatives Sociales en Milieux Éducatifs»:
«La déséducation fonctionne : en brouillant le rapport à soi, la personne n’est plus capable de lire ses sentiments ; en brouillant le rapport au corps, la personne n’arrive plus à lire ses besoins ; en brouillant le rapport avec les choses, les choses sont systématiquement remplacées par leur représentation ; en brouillant le rapport avec le jugement grâce à des rhétoriques fallacieuses. La déséducation vise un but évident : la soumission aux habitudes sociales, le désarmement moral. L’exclusion résulte d’une déséducation. On doit impérativement comprendre que cette exclusion est à la racine de toutes les violences. Nous ne pouvons pas accéder à l’humanité autrement qu’en intégrant cette partie de l’humanité que nous laissons dans la misère.»
On m’a rapporté qu’à partir du huitième/neuvième webisode, on va s’employer à reconstruire ce qui pourrait être une véritable éducation. J’ai déjà hâte…
En attendant, le professeur a besoin d’aide pour terminer «à son goût» sa démarche. S’il y avait dans la salle un infographiste et un «ingénieur» de son, je veux bien agir en relayeur. Seulement à m’écrire…
Ajout: Un communiqué de presse annonçant le lancement de la bande-annonce du projet «La Déséducation» vient d’être publié…
Mise à jour du 14 octobre: Daphnée Dion-Viens du journal Le Soleil consacre un article à la démarche.
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On ne fera pas dans la dentelle. Et en même temps, on perçoit un biais par la liste des gens rencontrés. Gilles Proulx… J’aime bien, très gentil en débat, mais la dernière fois qu’il a mis les pieds dans une école?
C’est plate ce que je vais écrire, mais j’ai dû relire récemment le bouquin que j’ai co-écrit il y a des lunes et je constate qu’on radote depuis un bout. Je me demande si le temps des dénonciations ne devrait pas laisser place à autre chose.
Qu’est-ce que ces reportages nous apprendront de nouveau? En quelque part, il faudrait peut-être se mettre en mode résolution de problème un jour ou l’autre. Mais en même temps, le Québec a l’air d’aimer stagner et les médias recherchent davantage à illustrer des problèmes qu’à indiquer des solutions. Mes écrits dénonciateurs passent mieux que ceux qui proposent des pistes. Comme si on aimait les crises.
Je lis que ces reportages parleront de solutions. J’ai hâte de voir.
@ M. Papineau,
Oh, que j’aime ça!
Monsieur Proulx,
Le Renouveau a planté pour des raisons pédagogiques, évaluatives mais aussi parce qu’on s’est empressé de proposer des solutions sans véritable concertation. Il aurait fallu tenir compte de tous les intervenants en éducation, ce qui ne fut pas le cas pour de nombreux enseignants. Il est fou de croire qu’on peut tout changer en éducation par le biais d’une réforme majeure. À mon avis, la théorie des petits est préférable. Il suffit de regarder ce qui se passe en Ontario ou ailleurs au Canada. Chacun devra faire un bout de chemin.
Par ailleurs, il va falloir poser la question des structures et des budgets. Le fric ne descend pas dans les classes. Ce n’est pas normal. Commissions scolaires et directions régionales font double emploi. Si ces directions avaient leur raison d’être à l’époque d’avant la fusion des CS, on peut se questionner sur leur rôle aujourd’hui. On allégerait la structure et le travail de bien des gens. Mais comme ceux qui travaillent dans les CS et les directions régionales travaillent aussi à protéger leur emploi, on est pas sorti du bois. D’autant plus qu’une partie de ces emplois sont syndiqués et que les syndicats résisteront farouchement à toute tentative de modification. Il est paradoxal de voir un syndicat proposer des changements en éducation tout en défendant un statut quo de ce genre ou en omettant de se prononcer sur ces sujets.
Comme je l’ai souvent écrit sur le blogue du feu RAEQ, je pense que les meilleures idées et les meilleures solutions pour faire avancer l’éducation doivent venir de la profession à laquelle vous appartenez.
Continuez par conséquent à stimuler votre monde en vous mettant, comme vous l’écriviez plus haut, en « mode résolution de problème »
Bon courage et bonne chance,
JPP
@ Luc Papineau
Peut-être sommes-nous encore au stade diagnostique parce que nous n’avons pas encore complètement fait notre deuil de ce qui a été, étape nécessaire avant de passer à autre chose?
Je suis psychologue scolaire et j’écris dans un blogue sur la psychologie scolaire et je réseaute sur Twitter dans un but professionnel et il ne me viendrait pas à l’idée d’écrire des choses négatives sur le système, car je sais que cela ne serait pas constructif. Il y a toujours eu des carriéristes, des gens des médias en quête de cotes d’écoutes, mais pour ma part, en me basant sur ma formation et mon code de déontologie, j’essaie de rester droit… Mon but à moi est de diffuser des connaissance, des techniques de motivation, pour aider les parents, les élèves, les enseignants et les autres intervenants intéressés à améliorer les performances, les apprentissages, la satisfaction, la motivation… Comme je dis à mon fils, ne gratte pas ton bobo, et il va guérir. Il faut passer à autre chose. http://psyscolaire.blogspot.com/