Le Québec est l’une des sociétés qui dépensent le plus sur le plan de l’éducation en terme de portion de son PIB (Québec 7,6 %, Ontario 6,2 %, Massachusetts 5,1 %, Finlande 5,8 %, Suède, 6,3 %, selon Secor, Focus Stratégique Québec 2010). Est-ce que les québécois et les québécoises recoivent de leur système d’éducation ce dont ils/elles seraient en droit de s’attendre en retour de cet important investissement? Je consultais ces documents ce soir, des indicateurs en éducation (1, 2) et je me disais que nous ne pouvons être satisfaits de la façon dont vont les choses en éducation au Québec…
Lorsque je consulte le taux de décrochage scolaire, qui constitue l’une des façons d’évaluer le niveau de performance de n’importe lequel système d’éducation, j’ai à l’esprit depuis que j’ai écrit ce billet consécutif à ma participation au colloque «Quand éducation s’arrime à garçons» que ça reste inacceptable que «un tiers des garçons et un quart des filles décrochent au Québec» (Égide Royer). Cela représente beaucoup de drames à l’échelle de ces individus ainsi qu’une forme de tragédie à l’échelle de notre collectivité.
Une autre manière d’évaluer le rendement de notre système d’éducation consiste à examiner dans quelle mesure les personnes acquièrent, durant leurs études primaires et secondaires, suffisamment de bonnes connaissances et de compétences de base qui constituent les premières étapes de leur continuum de formation.
Plusieurs observateurs croient que l’apprentissage efficace et efficient de la langue maternelle dès le début de la scolarisation, représente non seulement l’un des facteurs déterminant de la persévérance scolaire, mais aussi l’une des manières de concevoir le niveau d’alphabétisme ou de littératie, i.e de percevoir si une personne est «capable d’utiliser les imprimés de façon objective ainsi que l’information écrite pour fonctionner dans la société, parfaire ses connaissances et accroître son potentiel tout au long de sa vie d’enfant et d’adulte».
Le dernier document que René Larouche m’a fait parvenir me paraît très utile pour illustrer la nécessité d’examiner la problématique de l’apprentissage de la langue française au Québec sous l’angle de certaines conséquences importantes que le niveau d’alphabétisation ou de littératie ont sur le développement individuel ainsi que sur celui de la société actuelle et future, entre autres, sur le plan économique et global.
À titre d’exemple, un développement adéquat, efficace et efficient de la littératie a non seulement un impact majeur sur l’amélioration de la qualité de vie au quotidien, mais augmente beaucoup les chances d’obtenir un diplôme d’études secondaires, contribue autant à la prévention et à la diminution du chômage, qu’à assurer une plus grande réussite économique individuelle, etc.
À réfléchir…
Tags: "Administration scolaire" "La vie la vie en société" "Ordre professionnel" Partageons le savoir
« Plusieurs observateurs croient que l’apprentissage efficace et efficient de la langue maternelle dès le début de la scolarisation, représente non seulement l’un des facteurs déterminant de la persévérance scolaire »
Ce n’est pas une « croyance » partagée par certains observateurs Mario, c’est un constat qui s’appuie sur de solides résultats de recherche. Et malgré ces constats lourds, il y a encore des gens qui ne veulent pas voir.
À ma CS on a pris le parti de se donner un plan d’action pour l’apprentissage précoce de la lecture. On s’est associé avec des chercheurs pour mettre en place des approches qui ont été préalablement soumises à des évaluations rigoureuses. On a débuté et testé à petite échelle et ensuite on a étendu ces façons de faire.
Nous avons implanté dans les classes de maternelle, dès la rentrée 2010, un programme pour le développement des premiers apprentissages en lecture : La Forêt de l’alphabet. Ce programme a été développé et expérimenté par le Laboratoire sur les pratiques d’enseignement appuyées par la recherche de l’UQAM, sous la direction de Mme Monique Brodeur; une formation plus spécifique a été offerte aux orthopédagogues à l’automne 2010 afin de leur permettre d’intervenir efficacement et en cohérence. Après une seule année, certains résultats sont rien de moins que spectaculaires…
Avec des partenaires de trois commissions scolaires, de l’UQAM (Monique Brodeur, Line Laplante) et de l’Université Concordia (Phil Abrami) nous collaborons à l’adaptation française d’un des très rares logiciels pour l’apprentissage précoce de la littératie dont les impacts ont été évalués de façon rigoureuse : ABRACADABRA. Le MELS et le MDEI ont mis 450 000$ là-dedans. Les autres partenaires près de 300 000$. Il reste un 200 000$ à trouver. La beauté de ça c’est que quand ça va être prêt, ça va être en ligne et gratuit. Pas de redevances pour les développeurs.
Tous les enseignants de 1ère année recevront au printemps 2011 une formation de deux jours portant sur l’apprentissage de la lecture, en continuité avec la formation offerte aux enseignantes du préscolaire sur les premiers apprentissages. Une formation spécifique sera offerte aux orthopédagogues. Cette approche, La Roue, a été développée par Mme Lise Larouche et a obtenu en 1997 le prix d’excellence de la fondation Hilroy pour son caractère novateur. La Roue sera l’objet d’une évaluation rigoureuse à grande échelle menée par une équipe de chercheurs de l’UQO dirigée par le professeur Carl Bouchard. Bien sûr, des expérimentations à petite échelle ont été faites depuis trois ans. Des directions d’écoles ont dû renouveler tout leur matériel de lecture en 2e année parce que les élèves de « La Roue » savaient « trop lire » (sic).
Nous implantons au primaire et au 1er cycle du secondaire, avec l’appui du Laboratoire sur les pratiques d’enseignement appuyées par la recherche de l’UQAM, le Modèle d’intervention à trois niveaux pour l’apprentissage de la lecture (Modèle de réponse à l’intervention)
En collaboration avec une équipe dirigée par la professeure Lizanne Lafontaine de l’UQO, nous expérimentons dans deux écoles de milieu défavorisé, un modèle innovateur de formation continue pour les enseignantes du primaire portant sur la littératie précoce.
Huit écoles expérimenteront à l’automne en 2e année une adaptation du Peer assisted learning strategy (PALS). Cette adaptation a été réalisée et validée par le professeur Éric Dion de l’UQAM et son équipe.
Des activités de suivi, d’accompagnement et de transfert sont développées afin de bien ancrer ces nouvelles pratiques dans le quotidien des classes et des écoles. C’est majeur: pas de protocole d’accompagnement, suivi et évaluation, pas d’implantation…
Des gens regardent ça et trouvent le moyen de dire que tout ça ne respecterait pas toujours « l’esprit » du programme de formation… Peut-être. Ça veut juste dire tant qu’à moi que « l’esprit » du programme devrait être revu pour tenir compte des résultats de recherche.
Mets tout l’argent que tu veux dans les écoles, s’il ne sert pas à mettre en place les bonnes choses, ce sera dépensé en vain. Et les premiers à payer le prix quand les meilleures approches ne sont pas utilisées et que les premiers apprentissages en lecture ne soient pas supportés par des interventions précoces et intensives, ce sont justement les clientèles les plus à risque: élèves de milieux défavorisés, allophones, élèves avec des difficultés d’apprentissage.. Vois-tu, là encore, c’est une question de justice sociale. Encore, toujours.
Alors, tu viens faire une visite ?
Merci Marc de ces détails sur ce qui se passe chez vous. Tu as raison sur le fait que j’aurais pu être plus affirmatif sur l’importance des apprentissages en langue maternelle dès le début de la scolarisation.
J’accepte ton invitation avec plaisir. On arrange ça d’ici l’été ou au plus tard, cet automne.
Bons succès dans la suite de tes projets!
[…] certains billets déjà écrits ici sur le sujet qui « vieillisent assez bien » (1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8), j’ajoute aujourd’hui quelques références pouvant servir de repères pour […]