Du primaire au secondaire, à quoi s’attendre des élèves qui vivent la réforme du MEQ depuis quelques années ?
Le passage de cette réforme du primaire au secondaire… est-ce le choc auquel on peut s’attendre ?
Ces deux questions m’ont été posées par les directeurs d’études du secondaire de la région de Québec, ce vendredi 10 octobre. Ce billet représente l’essentiel (des notes, des pistes) de ma présentation aux enseignants, enseignantes du secondaire. Soixante minutes, en guise de conférence de clôture, pendant lesquelles je tenterai de communiquer ma passion des jeunes et des apprentissages… À quoi s’attendre ? À de la « belle jeunesse » ! L’arrivée de la réforme au secondaire, un choc ? Tout un ! Stimulant pour les uns, déroutant pour d’autres, des moments de remise en questions pour le plus grand bénéfice des jeunes.
Je vais m’efforcer de ne pas trop donner dans le cliché ! Les gens devant moi sont déjà des passionnés d’éducation. Ils ont lu, ils ont entendu, ils se sont déjà fait « une tête » à propos des enjeux qu’entraîne l’arrivée de la réforme au secondaire. Je choisis dans cette communication de m’adresser à eux « ad libere », ne pas trop suivre de notes, de parler en les regardant attentivement, en les synchronisant pour « prendre », également. Je m’attends à quelques centaines de personnes; les gens seront fatigués en ce vendredi P.M., trois heure… donc, le contenant de ma présentation risque d’être plus important que le contenu. Disons que je n’ai pas le goût de négliger ni l’un ni l’autre de ces aspects, mais je veux communiquer de la passion pour ce qui s’en vient… Je dois livrer ma communication avec dynamisme et engagement !
Les grandes lignes de ma présentation
Parler de mes motivations… (Clin d’oeil à M. Lasnier)
Je suis papa… (deux grands au CEGEP, un petit en troisième année)
Je suis directeur d’école:
– J’ai passé quinze ans au secondaire;
– Mon expertise se situe au niveau des relèves aux communautés religieuses;
– Dans les dernières années, je me suis beaucoup employé à développer le pédagogue en moi…
– Un mot sur notre expérience d’école ciblée.
Un premier jet : je crois avoir témoigné d’une grande confiance envers chacun(e) des enseignants(es) de mon école dans l’aventure de notre appropriation de la réforme; c’est ce dont je suis le plus fier…
³ La confiance est la capacité enfantine
d’aller vers ce que l’on ne connaît pas
comme si on le reconnaissait. ²
Christian Bobin
CARACTÉRISTIQUES DES JEUNES DU PRIMAIRE
Approche contrôle et affirmation
L’idée est la suivante : ce qui m’a frappé en arrivant au primaire, c’est le grand niveau de contrôle recherché au quotidien par les intervenants. Légitime diront certains. Abusif diront d’autres. Une chose est sûre, je ne m’étonne pas du grand besoin des adolescents au secondaire de s’affirmer. Je n’ai pas constaté cette préoccupation (aider les jeunes à mieux s’affirmer) à mon arrivé au primaire et je me suis employé à travailler là-dessus ! Beaucoup de progrès à faire encore sur ce chapitre, mais ça bouge… Les jeunes de demain seront mieux outillé.
Être actif dans ses apprentissages
C’est devenu notre leitmotiv, notre phrase clé ! Et vous pouvez pas vous imaginer l’ampleur de ce que ça veut dire… Prendre pour acquis que les étudiants seraient capables de « subir » des cours magistraux pendant soixante-quinze minutes d’affilées, sans broncher, serait une erreur… Varier les stimulis, c’est pas d’hier qu’on en parle en pédagogie, mais à présent c’est obligatoire si on veut garder une certaine signifiance… La réforme, ce n’est pas l’enseignement par projet ! Ce n’est surtout pas que cela. Il est grand temps d’oxygéner nos pratiques au services des apprentissages tout en gardant ce qui fait notre force dont notre capacité à captiver par la parole, si c’est le cas…
Être actif dans ses apprentissages (2)
Un mot pour qualifier ces apprentissages. Oui, on apprend à faire faire des liens avec les connaissances antérieures, oui, on construit du sens, oui, on part des tâches plutôt que du contenu et oui, on vise encore à ce que l’élève sache des choses… Le problème, c’est que de plus en plus de disparité survient entre les extrêmes (le « bon élève » et le « moins bon ». N.B. Je manque de nuance, désolé)) et ça ne s’enligne pas pour être pour le mieux… Pourquoi ? Parce que chaque milieu scolaire est responsable de sa réforme. Certains se sont dépêchés à délaisser le contenu pour les compétences (à raison peut-être, ils iront plus loin tantôt disent-ils…) d’autres ont cliqué rapidement et leurs élèves accomplissent des prodiges. Vous aurez à gérer au secondaire des spectres très larges dans vos profils d’élèves à l’entrée surtout si vous vous fiez aux seuls tests psychométriques ou de contenus disciplinaires pour les accepter dans vos écoles. Vous avez probablement déjà remarqué que certains élèves acceptés chez vous en 1re secondaire ne livrent pas ce qu’ils annonçaient ? Sûr que le concept d’élèves performants est en grande mouvance et vous aurez à vous adapter… De plus en plus de jeunes vivent des savoirs-agir intégrés et la rétention des apprentissages va en s’améliorant. Pour certains du moins !
Le prof, une source parmi tant d’autres
L’enseignant, seul pourvoyeur de connaissances : terminé ! Le prof qui considère que chacun des élèves devant lui peut apprendre les mêmes choses en même temps est sûr de se mettre dans le trouble dans le paradigme de l’apprentissage… L’enseignant a un rôle extrêmement important, mais il ne peut plus jouer à celui qui a le monopole des connaissances (s’il a déjà pu). Évidemment, on ne parle pas d’individualiser l’enseignement, mais la différenciation pédagogique, ça peut se faire sans tomber dans le piège des problèmes de gestion de classe !
Utilisateur de TIC
Les technologies comme leviers pour favoriser les apprentissages, non pas comme une fin en soi. Les élèves du primaire actuellement, sont étonnants ! Ils sont capables de grandes prouesses et il est urgent que les enseignants du secondaire prennent le relais de ceux du primaire qui travaillent fort à ce niveau actuellement. À l’Institut, je ne suis pas sûr que nous soyons représentatifs de ce qui se vit partout, mais je vous invite à jeter un coup d’oeil sur ce site et sur celui-ci pour vous convaincre de la puissance des TIC et de la publication WEB au service des apprentissages !
CE QUE L’ÉLÈVE APPREND AU PRIMAIRE
Ce qu’on vise à lui faire apprendre
Un mot sur la question des compétences. Vous dire jusqu’à quel point c’est une révolution que de viser à ce que nos jeunes deviennent compétents, pas juste savants, c’est vous dire aussi combien c’est difficile de migrer vers le travail à partir de tâches authentiques, de transformer nos pratiques évaluatives à même le quotidien, diminuer les longues séances de photos astreignantes et plutôt inutiles. Aussi, conscientiser l’ensemble des intervenants à la fonction « aide à l’apprentissage » plutôt que celle « du tri social » en matière de notes et de résultats scolaires… C’est un défi ! Patience et efforts. Beaucoup d’efforts… et de conscience professionnelle !
Sa vision du secondaire
Les élèves du primaire ont hâte d’arriver au secondaire. Les parents, un peu moins… Il est sûr qu’actuellement, l’actualité est parsemée d’exemples où les jeunes (les ados en particulier) sont montrés comme des « enfants-roi » ou des petits dictateurs… Au primaire, les germes du « mal d’être » ou d’une difficulté à être sont subtils à détecter. (Ici, je donne des exemples) L’effet de nos paroles, de nos gestes se traduit souvent par des répercussions à long terme. En ce moment, je suis positif face au temps que les parents prennent pour leurs enfants. Assemblées de parents « à guichet fermé », nombreuses communications, beaucoup de préoccupations; le parents prennent du temps pour leurs enfants au primaire. Je sais bien qu’une certaine distance doit s’installer au secondaire, mais à voir l’énergie de ces parents responsables et la place qu’occupe l’éducation dans l’actualité, je me prends à être rassuré pour l’avenir… Aussi, l’abondance du choix de beaux programmes au secondaire vous rend attrayants. Bravo !
Importance des adultes.
Je sais que vous le savez mais vous êtes important pour les jeunes… très important ! J’en suis à ma vingt-et-unième année et je n’en reviens pas combien c’est valorisant de travailler en éducation. Parfois, ça prends un peu d’abstraction pour ressentir cette valorisation, mais les principes de la réforme vont dans le bon sens, côté signifiance et importance du rôle des profs. Je crois sincèrement que la profession d’enseignant sortira gagnante du passage de la réforme au secondaire. Certes, le travail ne peut s’organiser autour des stricts besoins des travailleurs, mais en premier, autour de ceux des élèves; cela ne veut pas dire qu’il n’y aura pas de place pour « qualité de vie » et conditions de travail intéressantes. Le travail plus collaboratif qui contribue à briser l’isolement dans lequel on évolue parfois est un des gains de la réforme et puis, retrouver sa fibre d’apprenant : quel bonheur ! (Ici, j’aurai de la misère à m’arrêter…)
COMMENT S’APPROPRIER LA RÉFORME ?
Apprentissages et enseignement
Je le disais tout à l’heure, mais je le répète : la migration vers le paradigme de l’apprentissage est la clé du succès avec cette réforme. On peut tomber facilement dans le facile ici et vous êtes probablement « tannés » de l’entendre mais, se centrer sur l’enseignement et légitimer ses actes par «Oui, mais je vous l’ai dis ça ! Vous seriez supposé d’avoir compris !!!», ça ne passe plus ! Un conseil : dans le nouveau paradigme, il vous arrivera de constater qu’une information entendue est virtuellement inaudible; une information lue peut devenir invisible si on ne migre pas dans le nouveau système de règles. Alors, faudra pas se surprendre : chacun aura besoin de reprendre souvent une lecture, l’écoute de plusieurs conférences sur le même sujet, l’accès à plusieurs formations dans le même sous-domaine avant que ça fasse du sens et que la construction de vos connaissances s’opère ! Prenez ce matin avec M. Lasnier; je l’entends pour la quatrième fois… je commence à peine à voir du sens dans ce qu’il dit ! Est-ce qu’il vous a parlé dans le paradigme de l’apprentissage ? Est-ce qu’il était centré sur vous ? Je vous laisse le soin de votre réponse, mais je crois que cela vous arrivera souvent de voir passer de l’invisible et de l’inaudible ! Dans ce temps-là pensez à l’effet paradigme, en action. Je ne vois et j’entends que ce qui est conforme à mon système de règles. Tant que je ne déménagerai pas, cette information demeurera invisible… Alors bravo pour le choc cognitif de ce matin !
Attention aux stratégies d’évitement
Laissez-vous pas organiser, mais occupez-vous de vos affaires ! Attention aux «Je fais déjà cela !» ou aux «J’en suis à ma troisième réforme et ça fini toujours par passer, ce sont des modes». Je crois sincèrement que cette fois-ci on a affaire à du spécial :
– Ça part d’en bas vers le haut.
– Les enseignants ont été impliqués beaucoup; ce n’est pas une réforme de technocrates !
– Beaucoup des principes qui supportent la réforme sont basés sur des découvertes importantes des sciences de l’éducation et de la psycho-pédagogie !
– Etc.
Les enseignants : des apprenants !
Ce sont les meilleurs apprenants qui émergeront au sortir de l’appropriation de cette réforme. Attention, le changement de paradigme « remet le compteur à zéro ». Vos réussites d’hier peuvent devenir vos faiblesses de demain… En tout cas, constituer des obstacles important vers des améliorations substantielles à opérer pour votre plus grand bien !
Délais d’appropriation
Se donner du temps. Du temps de qualité. Du temps ensemble, en communauté éducative. Ça peut commencer par résoudre des vieux conflits qui traînent, prendre un café, se parler. Ça ne doit pas en rester là. Travailler dans un même esprit, c’est pas juste avoir du plaisir, c’est aussi développer la capacité d’échanger des points de vue divergeant sans se bouder pendant deux ans… Vous également, vous avez à développer vos compétences transversales de profs… dont celle de la patience et de la sérénité. Que dire de celle qu’on nomme la conscience professionnelle.
Implantation très progressive de nouvelles pratiques en évaluation et avènement tardif de nouveaux outils de communication (bulletins)
Nous avons fait ce choix et nous nous en félicitons… Je vous recommande ce lien pour apprécier ce point à sa juste valeur après quatre ans d’école ciblée ! Quelques idées, en rafale :
-C’est un des points les plus sensible de cette réforme; c’est peut-être pas la poignée la plus facile pour « prendre la boule »;
-Changer ses pratiques d’enseignement avant de modifier ses pratiques d’évaluation;
-Se souvenir qu’on évalue ce qu’on travaille avec les étudiants.
-Transformation progressive des rencontres de parents reliées au bulletin (présentation du portfolio, approche réflexive, etc.). Une célébration des apprentissages, pourquoi pas ?
-Des rencontres de parents animées où l’enseignant est le témoin des apprentissages racontés aux parents par l’élève;
-Privilégier la fonction d’aide à l’apprentissage !
-Implantation progressive du portfolio et du cyberportfolio.
-Fonctionnement en communauté d’apprentissage.
-Leadership de la direction…
INTÉGRATION DES TIC AUX APPRENTISSAGES
Investir dans la formation autant que dans la « machinerie »
Je sais que c’est un enjeu qui vous préoccupe; la plupart des enseignants sont intéressés par les TIC. Manque de temps, manque de support, «Ça marche pas», on a pas assez accès aux postes, «les jeunes en savent plus que moi»; ce sont tous des paroles qu’on entend parfois… De nombreuses formations sont disponibles dans le réseau : RECIT, AQUOPS, RIMA. De nombreuses ressources s’offrent à vous : RESCOL, VIRUS et… Mario, tout de go.
Autres « idées maîtresses »:
-Laisser chacun cheminer à son rythme;
-Apprécier l’importance du courrier électronique comme outil à l’apprentissage;
-Mesurer la force (motivation et puissant levier) de la publication WEB.
QUELQUES DÉFIS AU SECONDAIRE…
Votre présence quotidienne à l’école;
Les mises hors cours et la différenciation pédagogique;
Les programmes par compétence;
Voir venir les sources de tensions
Recours aux « champions »
Nommer des expériences réussies
Exprimer des émotions, des résistances; plus vite on le fait, plus on avance…
Faites votre réforme, pas celle des autres
Créer des opportunités… d’apprendre
L’implantation de la réforme est une belle aventure !
Se demander ce qui est impossible à faire en ce moment mais qui devenant possible révolutionnerait ma pratique ?
Question ? Nous conseilleriez-vous de débuter dès à présent les apprentissages sous la gouverne de la réforme ? (Mise à jour du lendemain : J’écrirai la réponse après avoir vécu la journée.. La question n’a plus de sens après la présention… En passant, le groupe de plus de quatre cent profs a été SUPER !)
Il est une chose qui n’est pas précisé mario dans votre article, c’est la perception des enfants, quant à ce passage, et je crois que si les autorités enseignantes se penchaient un peu plus sur ces problèmes, vus et ressentis par les enfants, on pourrait idéalement faire bouger les choses en bien, en ce qui concerne l’éducation en france.
Les enfants en primaire sont encore des bouts de chou, qui cherchent une certaine valorisation, une certaine tendresse de la part de leur maître ou maîtresse. Ils ont besoin de repères, autres que ceux que leur donne leur cocon familial. L’idéal est une classe, toujours la même, décorée à leur goût, par leurs soins, où ils pourraient laisser de petites choses bien à eux…un peu comme à la maison.
Les enfants en primaire apprennent en douceur. Dans le meilleur des cas ils n’ont qu’un interlocuteur tout au long de l’année et donc le temps de s’y attacher. Cette situation les rassure, les enfants ont également besoin d’habitudes préetablies, ce qui leur donne un sentiment de sécurité…
Et puis vient la 6ème, le secondaire et ce grand bouleversement, où se mêlent la fierté de devenir grand et la peur de l’inconnu.
cet enfant se retrouve propulsé dans une classe parmi 35 autres élèves, qui viennent bien souvent d’établissement différents, puisque qu’on favorise le brassage…
bien sûr ce n’est pas un mal, mais il arrive que l’on tombe dans une classe où l’on ne connaisse personne et dans ce cas précis, l’intégration est très dure.
Et puis autre fait nouveau pour cet enfant, il n’a plus SA classe. Il se retrouve avec huit, neuf ou dix professeurs différents, qui enseignent chacun une matière nouvelle, et qui ont leur classe. c’est donc à l’élève de se déplacer.
J’ai toujours trouvé ce sytème, au collège assez choquant, surtout pour les enfants. Continuer sur la voie du cm2, en ce qui concerne la classe permanente serait sans doute une situation qui leur permettrait d’appréhender leur année scolaire avec plus de facilité. un endroit où ils puissent laisser leurs livres , ce qui d’ailleurs, les fatiguerait certainement moins. Une autre chose…les professeurs ont parfois tendance à oublier qu’ils sont avant tout une équipe, et qu’ils ne sont pas seuls à donner des devoirs… Comment réagir lorsqu’on voit son enfant , alors qu’il vient de passer 8 heures à l’école, en général, rentrer à la maison avec encore deux heures de devoirs à faire à la maison ?
Je ne prône pas non plus, le laisser -aller général…mais je crois sincèrement que le système éducatif favorise aujourd’hui les enfants qui ont plus de facilités que d’autres, et fait plonger ceux qui ont des difficultés. L’enfant qui ne s’en sort plus décroche, et pour camoufler sa honte, il devient parfois turbulent, renfermé…
c’est tout un débat, une école idéale ;o)
ma fille a un an,cela vous laisse encore deux ans pour trouver des solutions miracle, messieurs les enseignants :o))…
J’ai oublié de préciser, et veuillez me pardonner que j’étais un peu hors sujet mais je ne savais pas où écrire ce post…
je crois qu’on a de plus en plus tendance à bousculer les enfants (et je dis enfants, pas élèves, car ce sont des enfants, comme vous êtes un homme, avant directeur d’école.)
On veut qu’ils soient prêts à affronter la vie de plus en plus vite, de plus en plus tôt…je croisd personnellement pour avois côtoyé des enfants ds le milieu du travail, et plus personnellment qu’un professeur..;qu’il faut leur laisser indemnes leurs années d’innocence,adapter votre mode d’éductation à l’enfant, et non l’enfant à l’éducation. Toutes les erreurs commises jusqu’à présent sont pour moi de ce fait.