Règle #4

Si vous pensez que votre professeur est sévère, attendez d’avoir un patron.
Je vais y aller de mémoire. Un passage du livre de Alan Bloom L’âme désarmée traîte de l’âme humaine et d’une analogie avec un ressort. Je crois que l’idée vient de Alain Finkielkraut, mais je ne suis pas certain. L’idée est la suivante : si on veut qu’un enfant ait une certaine énergie créatrice, il faut s’opposer à lui en bas âge, il est nécessaire qu’il ait une certaine opposition. Son âme est comme un ressort; plus on le tend, plus on le comprime, plus il aura de la force quand il sera grand… (Évidemment, cette « analogie » exige certaines nuances; n’importe laquelle tension n’est pas nécessairement bonne pour l’âme humaine…)

Tout est égal donc tout est relatif
Cette règle #4 m’a fait faire un détour de ce côté. Il m’arrive souvent d’y revenir. C’est le texte de la conférence prononcée par Allan Bloom, le vendredi 29 avril 1988 à l’occasion du colloque Éducation: le temps des solutions organisé par l’Agora au Centre d’Arts Orford, les 29, 30 avril et 1 er mai 1988. Un texte magistral qui précise pourquoi on a tant de problème avec l’autorité : le nihilisme, une espèce d’égalité de toute les valeurs ou la négation de celles-ci. Voici deux extraits significatifs, à mon avis :
« Le mot valeur au sens actuel a été forgé récemment et s’inscrit dans le relativisme moderne. En termes simples, le relativisme moderne est un relativisme portant sur les valeurs: les valeurs sont les produits ou plutôt les créations des cultures et n’ont aucun statut au-delà de ces cultures. Elles ne sont pas. Elles ne sont pas naturelles. Elles ne peuvent pas être vraies ou fausses. Avoir certaines valeurs ou ne pas les avoir est un acte de la volonté et rien de plus. Utiliser le langage des valeurs c’est dire tout cela. Nous le disons, mais nous ne savons pas que nous le disons. Telle est ma critique. Nous sommes intellectuellement démunis face à cette question, et ce devrait être le but de la formation générale que de nous préparer à l’aborder. »

« Le relativisme est l’épicentre de l’ouragan qui frappe notre éducation, non pas pour l’évidente raison qu’il semble impliquer qu’il n’y pas de moralité, que tout est permis, mais parce qu’il étouffe la plus puissante des raisons de se cultiver: le désir naïf de découvrir ce qui est bon pour vivre bien. »

La sévérité du maître d’école ou du patron pour assurer une autorité simpliste et déshumanisante, je n’y crois pas. Mais l’autorité (dans le sens africain du terme) qui vient de la personne qui a tout simplement pris plus de respirations, de la personne qui a vécu avant, de la personne qui a de l’expérience, de la personne qui sait parce qu’elle a vécu cela, celle-là, j’y crois. Et on ne devrait pas avoir à l’invoquer pour qu’elle se manifeste… Elle existe tout simplement. Quand quelqu’un est obliger de dire « Je suis le patron », c’est qu’il commence souvent à moins l’être, dans les faits !!!

Devenir capable de se « soumettre » à ce type d’autorité à l’école est un pré-requis. Être capable de s’affirmer, aussi; même si ce n’est pas mentionné dans la règle #4 ! Un jour ou l’autre, un enfant doit apprendre que les hiérarchies existent dans la nature, dans les organisations et dans la vie en société. Et ce n’est pas anti-démocratique !

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