Le carnetier que je suis, est-il un homme masqué ?

La poésie de Karl dit « la grange » nous apporte un regard assez paradoxal sur l’expérience carnetière : »Je pourrais bien sûr parler des carnets Web pour un instant se défilant éternellement mais pourquoi vouloir rédéfinir un phénomène qui n’a rien de phénoménal, qui n’est juste que l’expression renouvelée de l’envie de communiquer, de la possibilité d’imaginer, de créer, d’élaborer le texte et le contexte. »
Il cite l’auteur Gaston Bachelard dans un texte intitulé « Le masque ». Sa lecture de l’oeuvre le porte à croire que « le carnet Web est bien un masque » :
« Le porteur du masque se joue une pantomine, il étudie son orchestique en se mirant dans la surface réfléchissante de ses mots et finit par perdre son expression propre pour devenir l’expression adventice de son regard. Il n’est plus celui qui définit sa forme mais il vit à l’intérieur d’un kaléidoscope dont il serait lui-même la copie fractionnée et colorée de son irréalité. »
J’ai cherché dans l’oeuvre de Bachelard une interprétation moins faux-fuyante du pouvoir de la rêverie, car je ne me reconnais pas dans cette description de la démarche du carnetier. Voudrais-je me cacher derrière un masque sans vraiment m’en rendre compte ? Certes, y-a-t-il un jardin secret dans lequel je n’ose puiser pour choisir mes sujets d’écriture. Ma vie de couple, ce qui se passe dans ma famille et ce que je pense de certains sujets un peu trop loin de mon champ professionnel… tout cela je l’évite sans peine puisque c’est un choix que j’ai fait dès le début de cette expérience. À ce moment, peut-on dire « à la Henri Laborit » que je fuis les vrais choses ?
Je ne le crois pas, à preuve cet extrait d’un texte citant le même ouvrage de Bachelard, « Puis-je savoir qui je suis ? » :
« Dans la rêverie, nous dit Gaston Bachelard (Introduction de La poétique de la rêverie), « la poésie constitue à la fois le rêveur et son monde », une sorte de réconciliation du je et du moi. En nous obligeant à une prise de conscience, à un retour systématique sur nous-mêmes, cette manière d’utiliser l’image n’est pas une rêverie poétique mais « un accroissement de conscience, [Š], un renforcement de la cohérence psychique. » Bachelard propose de laisser vivre en nous la rêverie pour mieux en jouir et l’étudier, pour mieux nous construire. »
Étonnant quand même ! Le même auteur, la même source, mais deux regards opposés. Je persiste et je signe, Si ma démarche carnetière est l’effet d’un masque sur ce que je suis (du moins professionnellement), je me découvre une nature plus vraie que l’original…
N.B. En passant Karl, qu’elle est belle et lumineuse cette photo « Rue Jeanne-Mance » !!!

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