Je suis revenu à la maison vers trois heures du matin cette nuit. Je tenais à être présent, pour une fois, dans le lieu physique où se trouvaient les gens que je conseillais depuis le 7 septembre, «jour 1» du déclenchement de la campagne électorale fédérale. En effet, l’entreprise qui m’anime, iXmédia, a obtenu, fin août, le mandat de mettre sur pied le blocgue du Bloc québécois. Sans être impliqué dans le contenu rédactionnel de la campagne, notre rôle consistait surtout à fournir tous les conseils pouvant s’avérer utiles autour des bonnes pratiques en matière de modération, de transparence et de gestion de ce site Web de type interactif. Inutile de dire qu’en tant que spécialiste de l’utilisation des blogues au sein de notre entreprise, j’ai pris une part active dans ce mandat, ce qui m’a contraint à ne pas bloguer sur les enjeux de la campagne qui vient de se terminer; j’avais un intérêt professionnel à ce que mon client gagne ses élections… à quoi bon altérer l’intégrité de mon blogue professionnel puisque tout ce que j’aurais pu écrire aurait été grandement sujet à interprétation partisane!
Maintenant, la campagne est terminée. Notre mandat se termine en même temps. Si je tiens ce matin à écrire sur ce que je viens de vivre, c’est principalement parce que mon expérience a généré de formidables apprentissages que je veux nommer. À chaud (parce que j’aurai besoin d’un peu de recul pour voir un peu plus clair), je ne pourrai pas analyser complètement cette expérience, cette première oserais-je dire, d’avoir tenu un blogue d’une formation politique importante, ouvert et très fréquenté pendant une campagne nationale. Aussi, comme il s’agit d’un mandat particulier, il y a une portion d’analyse que nous nous devons chez iX, de garder pour nos clients, c’est normal!
Disons simplement que je possède maintenant la conviction qu’il est avantageux pour un parti politique de pouvoir compter sur un outil comme le blogue pour se placer en mode «conversation» avec la population, en particulier au moment d’une campagne électorale. J’en faisais l’hypothèse, j’ai maintenant sous la main plusieurs arguments pour étayer ma thèse. On ne parle pas encore ici d’une initiative qui a totalement livré tout ce qu’elle pouvait faire au niveau du «call for action», mais plusieurs retombées du blogue vont dans le sens d’avoir mobilisé les militants et de les avoir porté à agir pour augmenter le nombre de personnes votant «dans le sens voulu»!
Contrairement à ce que certains observateurs ont déclaré, il n’était pas que question de «parler entre bloquistes» sur le blogue du Bloc et ceux qui l’ont écrit, n’ont pas porté une grande attention aux 2 500 quelques commentaires postés en 38 jours. Un bon nombre d’interventions n’allaient pas du tout dans le sens des politiques du Bloc et c’est avec grand bonheur que j’ai accueilli la décision de notre client de tenir un lieu très ouvert dans les limites du bon goût (rf la politique éditoriale). Plusieurs intervenants ont ainsi nommé leur satisfaction de l’orientation prise, dont certains, de façon surprenante, parmi les tenants d’une autre option que celle du Bloc.
Parmi les moments forts qui me frappent, il y a ces contributions de Lise Payette et de Margaret Atwood; je me dis qu’elles ont accepté de reproduire le contenu de leur message sur le blogue et de le soumettre aux internautes parce que le climat installé était propice aux échanges constructifs…
Des gens me demandent aujourd’hui jusqu’à quel point le blogue du Bloc a joué un rôle important dans la campagne? Ma réponse immédiate (et forcément incomplète) à cette question n’aura peut-être pas de suite ici sur ce blogue; je veux d’abord y réfléchir, puis regarder froidement des indicateurs et garder pour notre client l’ensemble des points de vue sur cette question. Une chose est certaine pour moi néanmoins, le fait que des «spineurs» des autres partis soient venus sur le blocgue est un indice de son utilité à convaincre des gens de voter pour un parti, (voir cette intervention de «Michel», par exemple).
Évidemment, j’ai parcouru plusieurs blogues politiques tout au long du dernier mois et j’ai fait de belles découvertes. Chantal Hébert et Josée Legault ont vraiment trouvé le «ton blogue» et elles étaient incontournables dans les fils de nouvelles d’un agrégateur. Par contre, ma joueuse étoile était libérale; la candidate dans Sherbrooke Nathalie Goguen a tout un potentiel de blogueuse… Bravo! Mention honorable aux blogueurs qui ont dit non à Harper (plus d’une cinquantaine, tout de même) et à cette initiative des gens de l’Outaouais…
Aujourd’hui, je sors très satisfait de cette fabuleuse expérience; fatigué, mais extrêmement ravi. Je voulais vivre des occasions concrètes pour apprendre davantage du monde politique et cette incursion d’une quarantaine de jours dans le «crunchie» d’une campagne à l’intérieur d’un mandat d’envergure me motive beaucoup à améliorer notre offre de services tout autant qu’à mieux comprendre les stratégies et les outils pour bien répondre aux besoins.
J’imagine facilement que ce billet pourra surprendre. D’une part, le monde de la politique est intrigant et empreint d’un certain silence sur ce qui se passe habituellement en coulisse et d’autre part, tout le monde cherche à en savoir un peu plus parce que c’est un domaine lié au pouvoir. J’ai lu tout plein de critiques sur les campagnes Web des partis et j’avoue qu’en ce moment, je suis fasciné par la distance qui sépare les analystes et les politiques au niveau des préoccupations. Méconnaissance du Web de la part des politiques? Bien sûr… ils sont en apprentissage et se foutent un peu des points de vue de geek! Surtout qu’ils ont tellement l’habitude des gérants d’estrade. Mais bon… faudra quand même relativiser mon point de vue; je ne suis pas devenu un fin stratège politique en quarante jours. Je n’ai que rempli un mandat lié à un blogue de campagne. Tout ce qui touchait la stratégie Web, globalement, je suis arrivé un peu sur le tard pour pouvoir me permettre de commenter. Disons, qu’on pourra me qualifier «d’observateur privilégié». Et à ce titre, je peux affirmer une chose: les gens qui font de la politique vivent à trois cents milles à l’heure, sont presque toujours sur le mode «urgence» et tu n’as que bien peu de temps (quelques secondes, souvent) pour les convaincre de quoi que ce soit. Ce sont des bibittes bien particulières que j’apprends de plus en plus à aimer et qui ont bien plus de mérites qu’on leur en attribue dans la société. Je n’ai que des remerciements à leur adresser pour la confiance qu’ils ont témoignée à l’endroit de notre entreprise et de nos personnes (parce que je n’étais pas seul à les conseiller).
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Pour avoir été responsable du contenu de ce même blogue, « embedded » en quelque sorte au sein de l’équipe de communications du Bloc, je salue le rôle qu’a joué Mario. Son assiduité m’a permis de me concentrer sur ma tâche, orchestrer les interventions des candidats et candidates (vous voyez, j’ai pris les tics) en fonction des thèmes abordés et du déroulement de la campagne en collant à l’actualité comme l’irruption de la crise financière dans le décor.
Quand les conservateurs ont déclaré à la fin de la campagne qu’ils s’étaient fait battre à plate couture sur le plan des communications, c’est vrai et je peux vous dire que l’équipe du Bloc est plutôt talentueuse. Ils tirent vite et ratent rarement leur cible.
Ce n’était pas ma première expérience politique pour ma part. Je dois dire que c’était la première fois par contre où j’ai vu autant de synergie entre la direction du message, la rédaction du discours, la recherche et les communications. La gang du Bloc est très disciplinée et improvise assez peu à partir d’un canevas très bien arrêté d’avance.
Comme l’a affirmé Michel C. Auger, ils ont réussi à réinventer le Bloc, ce qui lui a inspiré de parler de l’appellation Bloc 2.0. Il leur reste à systématiser leurs efforts pour embrasser la politique 2.0 et ils n’auront plus besoin, d’après moi, d’experts pour leur dire quoi faire. Mario a raison d’être fier d’avoir été associé à cette nouvelle orientation.
En attendant, c’est sûr qu’Obama va continuer de donner le ton aux autres politiciens sur le web. Son organisation vient d’appliquer une autre première. Ils ont pris du placement publicitaire sur des jeux en ligne qui s’affiche seulement dans dix états particulièrement chauds.
Je suis curieux de voir ce que les partis provinciaux chercheront à nous proposer à ce niveau. Je connais quelques trucs qui aident un blogue à bien marcher (liberté éditoriale, liberté de commentaires, réciprocité…) et je crois que l’augmentation de l’influence de ce média se produira bientôt au Québec. Toutefois, la représentation des principaux partis demeure anémique. En dehors du fait que la majorité des blogueurs soient de tendance souverainiste, on ne retrouve pas vraiment de blogues largement visités et associés à un parti. Pour parler de ce que je connais le mieux, le PLQ, je demeure encore et toujours l’unique blogueur représentant cette formation politique sur le web pour l’heure. J’ai récemment senti que certains membres du parti voulaient bouger à ce sujet; on m’a même directement interpellé sur cette question, mais je manque de temps pour m’y investir. Le PLQ prendra-t-il le virage blogosphérique? Et ses adversaires?
Je n’ai malheureusement pas consulté ce blocgue mais je ne doute pas de la pertinence de ce nouvel outil pour les différents partis politiques. Ceci est une preuve que les nouvelles technologies d’information et de communication seront fort utilisées dans les années à venir pour les politiciens.